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En Colombie, les narco-trafiquants ont vraisemblablement un arbre à came dans leur jardin
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Le journal d'un fou d'art
Chapitre :
24 titres
XXIIème Chapitre
Un émule d'Arsène Lupin s'invite à la Biennale
01 Septembre 2004 |
Cet article se compose de 3 pages.
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Lundi 27 septembre 2004, pour l'avant-dernier jour de la Biennale des Antiquaires il y a eu foule dans les allées du Carrousel du Louvre où les exposants ont espéré se rattraper enfin d'un démarrage plutôt poussif. Malheureusement, la journée a tourné au cauchemar puisque parmi les amateurs présents, il y en avait au moins plus que décidé à repartir les mains pleines sans bourse délier. Pour ce faire, il n'a eu qu'à se rendre sur le stand de la maison Chopard où, profitant de l'inattention des vendeurs et des vigiles, il a subrepticement ouvert une vitrine pour s'emparer de deux énormes diamants valant près de 11 millions d'euros. La police a semblé effarée par l'inefficacité du système de sécurité mis en place sur le stand Chopard où personne n'a constaté le vol d'emblée, ce qui fait que le voleur, accompagné probablement d'un complice, a pu se fondre dans la foule et sortir de la Biennale avant que l'alarme ne soit donnée. N'ayant pas été d'un bon cru pour la plupart des exposants, cette manifestation aura au moins été synonyme de très gros coup pour un génie du tour de passe-passe auprès de qui Arsène Lupin ferait lui-même pâle figure. On a perdu la trace des voleurs des diamants de la Biennale mais on a retrouvé "Les Voleurs d' Or", un drame inédit en cinq actes d'Alexandre Dumas découvert par hasard par un chercheur québécois dans les archives de la Bibliothèque Nationale et appelé à être publié par l'éditeur Honoré Champion. Le hasard, moteur des surprises de la vie, bonnes ou mauvaises. Sans lui, on s'ennuierait ferme comme dans le jardin d'Eden où un serpent sournois incita Eve à croquer le fruit défendu. Ce jour-là, le hasard fit mal les choses puisqu'il donna naissance à notre monde où rien n'est parfait. Bref, j'ai rencontré durant la journée un marchand américain qui m'a parlé de ses bons coups et de ceux de ses rivaux réalisés au hasard pour finalement évoquer la belle aventure vécue par un chineur à Detroit qui dans une librairie trouva pour dix dollars quinze aquarelles au milieu d'un carton à dessins. "Le libraire ne connaissait rien à la peinture et n'avait donc pas idée que les initiales C.P figurant sur ces aquarelles étaient celles de Camille Pissarro. Pour la petite histoire, l'heureux chineur vendit chacune d'elles pour 15 000 dollars, c'est à dire qu'il empocha au total 225 000 dollars pour une mise initiale de dix dollars", a ajouté le marchand d'un ton envieux.
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Lundi 27 septembre 2004, pour l'avant-dernier jour de la Biennale des Antiquaires il y a eu foule dans les allées du Carrousel du Louvre où les exposants ont espéré se rattraper enfin d'un démarrage plutôt poussif. Malheureusement, la journée a tourné au cauchemar puisque parmi les amateurs présents, il y en avait au moins plus que décidé à repartir les mains pleines sans bourse délier. Pour ce faire, il n'a eu qu'à se rendre sur le stand de la maison Chopard où, profitant de l'inattention des vendeurs et des vigiles, il a subrepticement ouvert une vitrine pour s'emparer de deux énormes diamants valant près de 11 millions d'euros. La police a semblé effarée par l'inefficacité du système de sécurité mis en place sur le stand Chopard où personne n'a constaté le vol d'emblée, ce qui fait que le voleur, accompagné probablement d'un complice, a pu se fondre dans la foule et sortir de la Biennale avant que l'alarme ne soit donnée. N'ayant pas été d'un bon cru pour la plupart des exposants, cette manifestation aura au moins été synonyme de très gros coup pour un génie du tour de passe-passe auprès de qui Arsène Lupin ferait lui-même pâle figure. On a perdu la trace des voleurs des diamants de la Biennale mais on a retrouvé "Les Voleurs d' Or", un drame inédit en cinq actes d'Alexandre Dumas découvert par hasard par un chercheur québécois dans les archives de la Bibliothèque Nationale et appelé à être publié par l'éditeur Honoré Champion. Le hasard, moteur des surprises de la vie, bonnes ou mauvaises. Sans lui, on s'ennuierait ferme comme dans le jardin d'Eden où un serpent sournois incita Eve à croquer le fruit défendu. Ce jour-là, le hasard fit mal les choses puisqu'il donna naissance à notre monde où rien n'est parfait. Bref, j'ai rencontré durant la journée un marchand américain qui m'a parlé de ses bons coups et de ceux de ses rivaux réalisés au hasard pour finalement évoquer la belle aventure vécue par un chineur à Detroit qui dans une librairie trouva pour dix dollars quinze aquarelles au milieu d'un carton à dessins. "Le libraire ne connaissait rien à la peinture et n'avait donc pas idée que les initiales C.P figurant sur ces aquarelles étaient celles de Camille Pissarro. Pour la petite histoire, l'heureux chineur vendit chacune d'elles pour 15 000 dollars, c'est à dire qu'il empocha au total 225 000 dollars pour une mise initiale de dix dollars", a ajouté le marchand d'un ton envieux.
Le 21 septembre 2004, des coiffes amazoniennes en plumes ont été retirées d'une vente à Drouot en vertu de l'application de l'arrêté du 15 mai 1986 protégeant sur le territoire français les oiseaux- et notamment les perroquets- du département de Guyane, un texte renforçant sans limite de temps les mesures prises par la Convention de Washington visant à la protection des espèces en voie de disparition. L'application de ce décret a été quelque peu ubuesque dans la mesure où les oiseaux dont les plumes servirent à réaliser ces coiffes n'étaient plus protégeables vu que les Indiens les avaient zigouillés depuis bien longtemps. Vendredi 1er octobre 2004, les exposants de la Biennale des Antiquaires ont fait leurs comptes. Certains ont sauvé les meubles, d'autres ont été loin d'être satisfaits alors que la maison Chopard a enregistré une perte de quelque 11 millions d'euros suite au vol audacieux sur son stand de deux magnifiques diamants bruts, une somme que les assurances rechigneront peut-être à rembourser en mettant en cause le faible dispositif de sécurité mis en place pour protéger ces gemmes. A la foire de Chatou, les affaires ont été vraiment molles et nombre de marchands ont peiné à faire leurs frais tandis que les marchés de Vanves et de Saint-Ouen ont tourné au ralenti. En province, la situation a été pire au point que les brocanteurs ont cru que le mois d'août n'était pas fini. Lundi 4 octobre 2004, un chasseur de trésor anglais muni d'un détecteur de métaux a trouvé dans le sud de l'Angleterre un penny en or datant de 794 qu'il a confié à une salle de ventes après s'être vu dire que sa trouvaille valait au bas mot 200 000 euros. Les Anglais n'ont aucune loi leur interdisant de fouiller ainsi leur sol. En France, l'utilisation d'un détecteur est considérée comme un délit passible d'une forte amende, ce qui n'empêche pas certains petits malins de sillonner le pays avec ces poêles à frire et de revendre leur trouvailles en toute illégalité. Et on parle de l'Europe ... Jeudi 7 octobre 2004, grande foire aux antiquités à Saint-Ouen. Malgré la présence de 1000 exposants venus de province, de Belgique et d'Allemagne, les chineurs n'ont pas trouvé de trésors pas plus que les dizaines de gendarmes et de policiers en civil venus inspecter les lieux. Scène comique : s'étant vu demander par un pandore de présenter son livre de police, un brocanteur belge a eu toutes les peines du monde à expliquer à ce dernier qu'un tel registre n'existait pas dans son pays. Prié ensuite de montrer sa carte d'identité, le marchand a été tout étonné d'apprendre qu'elle n'était pas conforme. « Evidemment, elle n'a rien à voir avec une pièce d'identité française puisqu'il s'agit d'une carte belge », a répondu le marchand un brin excédé. L'Europe reste plus que jamais à faire, surtout dans le domaine du marché de l'art où les lois différent selon les pays et jusqu'à présent, les Français n'ont pas été gâtés en la matière. En dehors de bronzailles, de bibelots sans intérêts, de copies, de panars, de nanars et de la drouille en veux-tu en voilà, il n'y avait vraiment rien d'excitant à voir. Alors qu'on espérait un miracle ou du moins le signe d'une reprise, cette manifestation n'a débouché que sur une grande désillusion. Le même jour, lors d'un voyage officiel au Vietnam, le président Jacques Chirac a plaidé pour le respect des diversités culturelles tout en accusant les Etats-Unis de vouloir généraliser une « sous-culture » dans le monde. Ses propos n'ont pas manqué de scandaliser l'ambassadeur des Etats-Unis à Paris qui les a qualifiés de « lamentables ». Le chef de l'Etat a eu certes raison de vouloir défendre la spécificité culturelle de la France ou celle de tout autre pays pour mettre un frein à l'américanisation de la planète mais d'un autre côté, il a eu vraiment tort d'employer le terme de « sous-culture » au sujet des Etats-Unis. On peut à la limite critiquer l'attitude de Washington de vouloir imposer à d'autres pays sa manière de voir et de vivre mais il convient d'admirer les Américains quant à leur volonté de se cultiver. Déjà, les Etats européens, et la France en tête, se laissent damer le pion par les Etats-Unis en ne consacrant suffisamment pas d'argent pour promouvoir chacun leur culture, ce qui fait que le fossé se creuse au profit de ces derniers. Jacques Chirac aura beau faire rouler les tambours, rien n'y fera tant que le reste du monde ne consentira pas à faire suffisamment d'efforts pour contrebalancer l'hégémonie américaine. Les choses iront enfin dans le bon sens le jour où les musées français enregistreront autant de visiteurs autochtones qu'étrangers et aussi lorsque le budget du ministère de la culture sera conséquent pour défendre et exporter la culture française. A qui la faute si les plus grands collectionneurs de la planète sont en majorité des Américains ? Vendredi 8 octobre 2004, les chineurs ont pour la plupart préféré s'abstenir de venir aux puces où seulement quelques courageux ont arpenté des allées désespérément désertes. Errant l'âme en peine, l'un d'eux surnommé « Le Stressé » s'est exclamé que le marché de l'art risquait de ne pas se relever de la crise. « Cela fait des mois que je ne suis pas parvenu à faire un bon coup, ce qui signifie que la bonne came fait défaut », a-t-il ajouté avant de me raconter avoir loupé le coup de sa vie en 1996 à Drouot. « Le jour de la visite, j'avais repéré dans une salle un dessin d'homme nu sur papier bleu qui avait été considéré par les experts comme étant une œuvre de l'école française du XVIIIe siècle. Tu parles ! J'avais tout de suite pigé qu'il s'agissait en fait d'un dessin qui pouvait être attribué à Annibale Carrache. Le jour de la vente, j'ai attendu plus de deux heures avant qu'il ne passe entre une série de casseroles. Estimé 1500 à 2000 francs, il est vite monté à 15 000 puis 20 000 et j'avais beau lever le doigt, il y avait une enchère au téléphone pour me contrer. Bref, j'ai renoncé lorsque la barre des 100 000 francs a été atteinte pour apprendre ensuite qu'il avait été revendu au Getty Museum pour 3,2 millions de francs », a signalé « Le Stressé » avec une pointe de regret dans la voix.
Ce jour-là, les experts de la vente n'étaient pas inspirés alors qu'il avait vu juste sauf que la chance ne fut pas avec lui. Toutefois, il est vraisemblable qu'il n'aurait pas emporté la partie en poussant un peu plus les enchères. Durant la journée, discussion au sujet de l'état du marché avec le grand galeriste Charles Bailly qui m'a déclaré sans ambages que les affaires étaient nulles en France. « Cela semble même foutu au point que je suis obligé de me tourner de plus en plus vers l'étranger pour faire tourner ma galerie », a-t-il déclaré tout en ajoutant avoir réalisé hors de France un coup faramineux dont les journaux parleront très prochainement. Visite au Louvre des Antiquaires où les marchands ont continué à faire grise mine. L'un d'eux, spécialisé en peinture ancienne, m'a avoué que l'année 2004 était la pire qu'il avait connue. « Et pour corser le tout, je me retrouve en conflit avec la Maison des Artistes qui me réclame des droits sur toutes les œuvres que j'ai vendues durant ces trois dernières années alors que je pensais qu'il ne s'appliquaient que sur les peintures signées », a-t-il lâché en maugréant. Nombre de marchands ont cru que ces droits n'étaient payables que sur les peintres modernes vivants ou morts depuis moins de 70 ans. Eh bien non, il faut en fait les acquitter sur toutes les œuvres peintes ou sur toutes les sculptures, indifféremment de l'époque où elle ont pu être créées. Ainsi, une taxe d'un pour cent peut être perçue sur la vente d'un tableau du XVIe ou du XVIIe siècle, ce qui paraît pour le moins incongru puisque les droits des ayants-droit sont censés courir sur 70 ans. A ce régime là, on comprend que les galeristes étrangers soient bien mieux lotis que les Français soumis à des taxations propres à les étrangler.
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