Peu de gens dans le monde connaissent Carcaliu, un village situé sur les rives du Danube en Roumanie et celui-ci n'aurait jamais fait parler de lui s'il n'avait pas été le lieu de résidence d'un des co-auteur du vol de sept chefs d'œuvres commis le 16 octobre 2012 au Kunsthal museum de Rotterdam que sa mère aurait brûlés pour effacer toute trace de son forfait.
L'homme et sa mère font partie des six Roumains actuellement jugés à Bucarest depuis le 13 août 2013 pour ce vol audacieux qui ne dura que trois petites minutes. En juillet, Olga Dogaru a avoué avoir détruit par le feu ces œuvres inestimables réalisées par Picasso, Monet, Gauguin, Meyer de Haan, Lucian Freud et Matisse et dont la valeur totale a été estimée à quelque 100 millions d'euros.
Les analyses des cendres trouvées par la police au domicile de cette dernière ont démontré qu'au moins trois ou quatre peintures avaient été brûlées mais rien n'a prouvé qu'il s'agissait de celles volées au musée néerlandais.
L'affaire de ce vol a causé un grand émoi parmi les habitants de ce paisible village entouré de champs de tournesols et de vignes lesquels font partie d'une minorité ethnique parlant surtout le russe dont les ancêtres avaient fui la Russie il y a 300 ans à la suite de persécutions.
Considéré comme une brebis galeuse par les habitants du village qui étaient déjà las des exactions qu'ils subissaient de la part de son gang, Radu Dogaru, le principal suspect du vol de Rotterdam a également été mis en examen pour son implication présumée dans des affaires de meurtres et de trafics d'êtres humains.
Suite à son arrestation, sa mère aurait été récupérer les toiles volées qu'il aurait enterrées durant des mois dans un cimetière du village pour alors les brûler afin d'éviter que des preuves formelles soient présentées contre lui.
En attendant, des œuvres comme « Waterloo Bridge » de Monet, « L'Arlequin » de Picasso ou « Femme aux yeux clos » de Lucian Freud sont restées introuvables et les habitants de Carcaliu sont en colère à l'idée que le nom de leur village soit désormais entaché par ce vol qui a secoué le monde de l'art.
Depuis l'intégration de certains pays de l'Est à l'Union Européenne, les vols commis dans plusieurs musées se sont malheureusement aggravés, l'ouverture des frontières ayant permis à des gangs de Roumanie, d'Albanie ou de l'ex-Yougoslavie de jeter leur dévolu sur des trésors artistiques abrités hors de leurs pays, notamment pour tenter de les revendre à des groupes mafieux ukrainiens ou russes.
La liste des vols s'est brutalement aggravé durant ces dernières années. Avant celui de Rotterdam, le 21 août 2010 un tableau de fleurs de Van Gogh avait été dérobé au musée Mahmoud Khalil du Caire le 21 août 2010 et celui-ci est resté introuvable. Le 20 mai de la même année, un cambrioleur d'origine yougoslave avait volé au Musée d'Art Moderne de Paris entre autres des œuvres de Matisse, Picasso ou Léger en profitant d'une défaillance du système d'alarme. Là encore, ces œuvres valant au total plus de 100 millions d'euros se sont évaporées dans la nature et ont été présumées détruites. Il y eut également un vol important au Musée Fesch en Corse commis par un employé dans le but, avait-il prétendu, de faire pression sur le maire d'Ajaccio pour obtenir un logement mais en allant récupérer les œuvres volées qu'il avait mis dans sa voiture, les policiers constatèrent que son véhicule été forcé et que celles-ci avaient disparu.
Le 10 février 2008, quatre œuvres de Cézanne, Degas, Van Gogh et Monet d'une valeur de plus de 110 millions d'euros avait été volée dans un musée à Zurich. Le Van Gogh et le Monet furent plus tard retrouvés mais pas les deux autres.
Le 5 août 2007, deux peintures de Brueghel et deux de Sisley et Monet avaient été volées au Musée Jules Chéret de Nice. Elles furent retrouvées un an plus tard et en décembre 2011, 5 hommes arrêtés par le FBI aux USA furent condamnés à des peines allant de deux à neuf années d'emprisonnement pour cette affaire.
Le 25 février 2006, des œuvres de Dali, Picasso, Matisse et Monet d'une valeur totale de 55 millions d'euros furent dérobées au Chacara do Ceu Museum durant le carnaval de Rio de Janeiro et ne furent jamais retrouvées.
Le 22 août 2004, le célèbre « Cri » et « La Madonne » d'Edvard Munch estimés à 100 millions d'euros furent dérobées au Musée d'Oslo avant d'être retrouvés endommagés deux ans plus tard. Le 7 décembre 2002, deux œuvres de Van Gogh furent volées au Musée Van Gogh d'Amsterdam et la police n'a toujours pas réussi à mettre la main sur ceux-ci.
Le vol le plus spectaculaire eut lieu en mars 1990 au Isabella Stewart Gardner Museum de Boston lorsqu'un gang s'empara de 13 œuvres d'une valeur totale de 500 millions de dollars dont deux rares peintures de Vermeer et Rembrandt. Il a fallu attendre jusqu'au mois de mars 2013 pour que les autorités identifient les voleurs mais il était trop tard pour les juger, le délai de prescription pour ce vol ayant été dépassé.
Avec l'expansion du marché de l'art dans les années 1980, les vols commis dans des églises et dans des résidences huppées en Europe s'était accrus d'une manière inquiétante mais les musées étaient alors moins ciblés qu'à présent. Il y a quelques années, plusieurs institutions européennes furent victimes du prédateur alsacien Stéphane Breitwieser qui déroba au moins 110 oeuvres et objets au cours de ses pérégrinations. Là aussi, sa mère se chargea de faire disparaître son butin en détruisant des tableaux et en jetant de multiples objets dans un fleuve. Rappelons que le premier vol important de l'histoire eut lieu le 21 août 1911 lorsque la célèbre « Joconde » de Léonard de Vinci disparut du musée du Louvre, emportée par un maçon italien avant d'être retrouvée en décembre 1913.
Adrian Darmon