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« Mon travail est l’objectivation de mes relations avec le monde » (Claes Oldenburg)
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Le journal d'un fou d'art
Les fous d'art, ivres de savoir et de découvertes, riches ou moins nantis et sans cesse à l'affût des nouvelles relatives au marché de l'art, forment une belle légion à travers le monde. Sans eux, ce marché n'aurait donc sûrement rien de légendaire. Depuis plus d'une quinzaine d'années, Adrian Darmon a donc rassemblé à travers plus de 2200 pages de multiples anecdotes souvent croustillantes sur les chineurs, amateurs et autres acteurs de cet univers plutôt incroyable et parfois impitoyable.
Xème Chapitre
COMEDIA DELL'ARTE
01 Juillet 2001 |
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Ceux qui enchérissent sur des pièces prestigieuses n'ont pas l'habitude de se manifester ouvertement dans les salles de ventes. Soit ils se font discrets au milieu de l'assistance, soit ils font monter les enchères au téléphone ou alors ils utilisent des complices pour ce faire. On connaît rarement l'acquéreur d'une pièce importante, ce qui signifie que le secret est de mise à l'étage supérieur du marché. Se faire connaître comme enchérisseur dans une vente, c'est en fait susciter l'attention de rivaux et provoquer alors une bataille d'enchères. C'est en quelque sorte déclencher le jeu du « tu veux l'avoir, tu auras à payer le prix fort ». Il y a quelques jours, on a laissé croire que l'acheteur du magnifique manuscrit du XIVe siècle de Piccolomini avait été acquis pour 14 millions FF le 28 juin à Drouot par l'homme d'affaires et Président du conseil italien Silvio Berlusconi. Fausse piste… En réalité, ce manuscrit a été acheté pour le Getty Museum par l'intermédiaire du marchand parisien Guy Ladrière qui, placé au fond de la salle le jour de la vente, transmettait ses enchères avec son portable, à une acolyte italienne placée au premier rang. Une belle stratégie puisque les observateurs ont cru que cette dernière était tout bonnement la représentante du Signor Berlusconi. En n'intervenant pas directement dans la bataille des enchères, le musée a peut-être économisé trois ou quatre millions FF, ce qui n'est pas une paille, tout en profitant de la publicité faite autour de cette vente. Jeudi 19 juillet, j'apprends que mon article « Règlements de comptes à O.K Biennale » a remué le monde des grands antiquaires. Pourtant, je n'ai révélé que la moitié de ce que m'a appris «gorge profonde», mon informateur issu de leur milieu. Bref, le Syndicat National des Antiquaires serait en émoi et certains de ses membres souhaiteraient insister sur l'application d'un code de conduite afin que leurs activités se fassent sous l'auréole de la probité. L'un d'eux m'a avoué que ce qui se passe en politique est aussi à l'image du marché de l'art où les rivalités et les coups tordus font partie de son quotidien. «Le marché de l'art n'est guère différent des autres domaines et ce serait une erreur de faire croire que ceux qui l'animent sont tous chevaleresques et gentils et que les magouilles n'existent pas. Le comparer à un paradis, c'est plutôt s'offrir des coups de bâtons en retour », me dit-il. «On fait certes un beau métier mais la concurrence est vive. Comme la situation économique n'est actuellement guère encourageante, certains n'hésitent pas à franchir les limites du convenable en étant prêts à tout pour maintenir leur position», ajoute-t-il d'un ton sournois. Je me permets de préciser que mon article n'a été que le prolongement de celui du «Parisien» sur le déclenchement d'une guerre entre organisateurs de salons, le CMO et la SOC, née d'un différend sur la tenue du Salon des Tuileries en mars dernier. Tout est donc parti de cette histoire qui a ranimé de vieilles rancœurs et mis le marché en ébullition.
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Ceux qui enchérissent sur des pièces prestigieuses n'ont pas l'habitude de se manifester ouvertement dans les salles de ventes. Soit ils se font discrets au milieu de l'assistance, soit ils font monter les enchères au téléphone ou alors ils utilisent des complices pour ce faire. On connaît rarement l'acquéreur d'une pièce importante, ce qui signifie que le secret est de mise à l'étage supérieur du marché. Se faire connaître comme enchérisseur dans une vente, c'est en fait susciter l'attention de rivaux et provoquer alors une bataille d'enchères. C'est en quelque sorte déclencher le jeu du « tu veux l'avoir, tu auras à payer le prix fort ». Il y a quelques jours, on a laissé croire que l'acheteur du magnifique manuscrit du XIVe siècle de Piccolomini avait été acquis pour 14 millions FF le 28 juin à Drouot par l'homme d'affaires et Président du conseil italien Silvio Berlusconi. Fausse piste… En réalité, ce manuscrit a été acheté pour le Getty Museum par l'intermédiaire du marchand parisien Guy Ladrière qui, placé au fond de la salle le jour de la vente, transmettait ses enchères avec son portable, à une acolyte italienne placée au premier rang. Une belle stratégie puisque les observateurs ont cru que cette dernière était tout bonnement la représentante du Signor Berlusconi. En n'intervenant pas directement dans la bataille des enchères, le musée a peut-être économisé trois ou quatre millions FF, ce qui n'est pas une paille, tout en profitant de la publicité faite autour de cette vente. Jeudi 19 juillet, j'apprends que mon article « Règlements de comptes à O.K Biennale » a remué le monde des grands antiquaires. Pourtant, je n'ai révélé que la moitié de ce que m'a appris «gorge profonde», mon informateur issu de leur milieu. Bref, le Syndicat National des Antiquaires serait en émoi et certains de ses membres souhaiteraient insister sur l'application d'un code de conduite afin que leurs activités se fassent sous l'auréole de la probité. L'un d'eux m'a avoué que ce qui se passe en politique est aussi à l'image du marché de l'art où les rivalités et les coups tordus font partie de son quotidien. «Le marché de l'art n'est guère différent des autres domaines et ce serait une erreur de faire croire que ceux qui l'animent sont tous chevaleresques et gentils et que les magouilles n'existent pas. Le comparer à un paradis, c'est plutôt s'offrir des coups de bâtons en retour », me dit-il. «On fait certes un beau métier mais la concurrence est vive. Comme la situation économique n'est actuellement guère encourageante, certains n'hésitent pas à franchir les limites du convenable en étant prêts à tout pour maintenir leur position», ajoute-t-il d'un ton sournois. Je me permets de préciser que mon article n'a été que le prolongement de celui du «Parisien» sur le déclenchement d'une guerre entre organisateurs de salons, le CMO et la SOC, née d'un différend sur la tenue du Salon des Tuileries en mars dernier. Tout est donc parti de cette histoire qui a ranimé de vieilles rancœurs et mis le marché en ébullition.
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