Dimanche 8 octobre, je croise aux Puces de Saint-Ouen un ex-marchand de tableaux du marché Dauphine qui m'avoue être content de ne plus avoir à perdre son temps à tenir un stand le week-end avant de me narrer dans le détail le bon coup qu'il a fait la semaine précédente en chinant au marché Paul Bert. Il a acheté un bouquet de fleurs signé «F.L» pour une bouchée de pain, une œuvre qui, selon ses recherches, daterait de 1953.
Bonjour la chance. Le brocanteur qui lui a vendu cette huile sur toile ne savait pas qui était «F.L» lequel n'a rien à voir avec la célèbre tour qui domine Paris, pas plus qu'avec Jean Eiffel, créateur de nombre de dessins humoristiques il y a cinquante ans.
Il ne faut vraiment pas être devin pour savoir que Fernand Léger signait souvent ses œuvres de ses initiales. Le découvreur de ce tableau, qui m'affirme mieux travailler à partir de chez lui au lieu de se morfondre dans un stand aux Puces, va devoir maintenant s'atteler à tenter d'obtenir un certificat d'authenticité pour celui-ci, un rude boulot en perspective vu que le Comité Léger semble plutôt chiche lorsqu'il s'agit de délivrer des opinions favorables.
En outre, je n'ose lui dire que le comité Léger va se montrer retors car l'artiste signait plutôt ses huiles «F. Léger» au lieu de «F.L», initiales plutôt utilisées pour ses aquarelles.
Jeudi 12 octobre, le quartier Drouot est en fête comme chaque année et procure ainsi l'occasion aux pique-assiettes de se rafraîchir le gosier et se remplir la panse à bon compte sans vraiment daigner se rincer l'œil dans les boutiques qu'ils visitent.
Jean Tiberi, le maire de Paris, oublie pour une heure son exclusion imminente du R.P.R pour visiter le quartier au pas de course. Des marchands se sont mis sur leur 31 pour le recevoir mais tout ce beau monde semble dépassé par l'inévitable Camille Bürgi qui a fait les choses en grand. Une petite foule s'agglutine devant la vitrine de sa grande boutique, animée par un jeune couple en habits d'époque Louis XV qui s'affaire et s'extasie avec des mimiques grand-guignolesques autour d'un magnifique secrétaire. Effet réussi devant des badauds ébaubis…
A l'intérieur, des curieux à l'air intéressé s'aventurent à demander des prix à ses collaborateurs et restent carrément bouche bée à l'énoncé de sommes propres à défriser n'importe quel mouton.
19 heures 30, je file vers l'avenue Matignon où Enrico Navarra inaugure une exposition proprement délirante. Durant le trajet, France Info crépite de nouvelles alarmantes en provenance d'Israël et des territoires palestiniens où trois soldats ont été sauvagement lynchés à Ramallah. La paix est en danger et le spectre d'une situation comparable à celle de la Guerre du Golfe ressurgit brutalement.
Si les choses s'enveniment, une nouvelle crise économique viendra probablement mettre un terme à la belle embellie enregistrée dans tous les secteurs depuis maintenant quatre ans. Déjà, les marchés boursiers vacillent alors que des fanatiques menacent d'embraser le Proche-Orient. En attendant, Dieu aurait mieux fait de placer Jérusalem au ciel, loin de la folie des hommes… N'y aurait-t-il que le sang pour abreuver cette cité mythique ?