Une nouvelle controverse est née concernant l'interprétation de l'art rupestre, le préhistorien français Jean Clottes et l'anthropologue sud-africain David Lewis-Williams réaffirmant que celui-ci aurait une origine chamaniste. Ces deux spécialistes ont déjà publié en 1996 un ouvrage intitulé «Les Chamans et la préhistoire» dans lequel ils ont affirmé que l'art pariétale était le fait de chamans travaillant en état de transes pour entrer en contact avec les esprits.
Le chaman était avant tout un sorcier au sein d'une société tribal, chargé de guérir les malades, de prédire l'avenir ou de procéder à des cérémonies pour la chasse.
Les peintures ornant les grottes rupestres auraient été ainsi exécutées par des chamans selon ces deux spécialistes mais leur opinion a néanmoins soulevé un tollé parmi leurs confrères.
Pour faire face à leurs contradicteurs, ils viennent de rééditer leur ouvrage en se basant sur les découvertes faites dans la grotte Chauvet, la dernière mise à jour en France, qui selon eux renforcent leur hypothèse.
Depuis que les grottes rupestres ont été découvertes, les spécialistes ont sans cesse décrété que les peintures, gravures et sculptures n'avaient pas eu d'autre objet que de décorer des parois, des outils et des armes.
Certains d'entre eux ont néanmoins trouvé qu'il était plutôt bizarre de se servir de passages obscurs et peu faciles d'accès pour créer de telles Å"uvres. On a ensuite évoqué d'autres rites qui auraient fait des images des symboles pour des tribus mais la plupart des grottes recelaient d'images plus ou moins semblables. Alors, l'abbé Breuil, le plus grand expert de l'art préhistorique à la fin du XIXe siècle, émit l'opinion selon laquelle les images trouvées sur les parois servaient à la préparation de la chasse et aider à la capture des animaux.
Toutes ces interprétations ont été néanmoins battues en brèche jusqu'au début des années 1960 lorsqu'on détermina que la caverne était une sorte de sanctuaire dans lequel les images avaient une signification précise avec un symbolisme sexuel marqué pour certains animaux comme le cheval, le bison ou l'aurochs mais cette idée n'emporta toutefois pas l'adhésion de tous. En fait, faute de disposer d'éléments probants, l'art préhistoire reste un domaine totalement hypothétique. On ne sait d'ailleurs pas grand chose de la vie des hommes préhistoriques pas plus qu'on n'a compris comment et pourquoi l'Homme de Neandertal a été supplanté par l'Homo Sapiens Sapiens dont on sait seulement qu'il était plus intelligent.
Les grottes étaient-elles réservées aux initiés ? On sait que les hommes préhistoriques vivaient à leurs entrées et non au fond où il était impossible de faire du feu sans s'asphyxier.
Pour Jean Clottes, seuls les chamans osaient s'aventurer au fond des grottes. Ils se mettaient alors en transes pour se livrer à des rites magiques et passer d'un monde à l'autre.
Les chamans étaient initiés au dessin entre autres choses et le bestiaire représenté dans les grottes avait un rapport avec la forme de religion pratiquée par les hommes de la préhistoire. De plus vers 25 000 avant notre ère, les animaux étaient en majorité des bêtes sauvages que ces hommes ne chassaient probablement pas pour se nourrir.
Vers l'an 10 000 avant J.-C, la proportion de ces animaux sauvage baissa, ce qui démontre un changement d'attitudes ou de rites.
Emanation chamaniste ou non, l'art rupestre parle néanmoins de lui-même, à savoir que ceux qui dessinèrent ou peignirent des scènes sur les parois des grottes furent de grands artistes chez qui on peut déceler tous les ferments de l'art moderne. N'empêche, les théories avancées par les uns et les autres servent quand même à faire avancer les recherches dans un domaine difficile à défricher. Quoiqu'il en soit, on restera toujours aussi béat d'admiration pour ces images sorties de la nuit des temps.