L'affairiste Dan Loeb, patron du groupe Third Point specialisé dans les hedge funds a poursuivi sa campagne pour détrôner William Ruprecht, Président de Sotheby's et détenteur de 9,4% des actions de cette société de ventes aux enchères fondée il y a 269 ans.
Après avoir dénoncé l'utilisation par Ruprecht d'une voiture avec chauffeur pour plus de 120 000 dollars par an, Loeb, 51 ans, a maintenant accusé ce dernier d'avoir mésestimé l'importance de l'art moderne et contemporain en laissant Christie's damer le pion à Sotheby's dans ce domaine tout en ayant mal perçu l'importance vitale des marchés asiatiques pour ainsi engendrer une crise au sein de son groupe.
Connu pour prendre des participations dans des sociétés pour ensuite lancer des attaques contre leurs directions, Loeb a pris un malin plaisir à s'en prendre à Sotheby's en déclarant que François-Henri Pinault, le patron de Christie's s'était montré très entreprenant pour investir de nouveaux marchés alors que les responsables de Sotheby's se contentaient de n'attirer que des gros collectionneurs en leur vendant des oeuvres prestigieuses, à l'image du "Cri" d'Edvard Munch, cédé l'an dernier au prix record de 120 millions de dollars pour se montrer trop élitistes en confondant leur style de vie avec celui de leurs clients alors que le marché générait plus profits avec des oeuvres vendues entre 50 000 et 500 000 dollars.
Sotheby's n'a guère apprécié les conclusions de Loeb en le considérant comme un prédateur visant à déstabiliser le groupe de vente pour le pousser à changer sa politique de vente dans le domaine de l'art contemporain et moderne afin de faire grimper sa valeur en bourse. Loeb revendrait ainsi ses actions avec un joli bénéfice au passage sauf qu'avec un tel investisseur, le groupe de vente risque de devenir une sorte de Lehman Brothers du marché de l'art.
A cet égard, il convient de ne pas oublier que les oeuvres d'art n'ont rien à voir avec les matières premières dont le marché est régulé par le système du fixing alors que les ventes aux enchères dépendent avant tout du bon vouloir des acheteurs, ce qui signifie que les oeuvres n'ont pas de valeur fixe.
Déjà, les maisons de vente ont de plus en plus piétiné les plates-bandes des galeries en courant le risque de détruire le principe des vases communicants qui veut que les marchands se fournissent en oeuvres dans les ventes aux enchères pour les revendre ensuite à leurs clients au lieu de mettre les créations de leurs artistes aux enchères, ce qui est de moins en moins le cas désormais. Au début de la 3e semaine d'octobre 2013, Christie's a d'ailleurs fait une amère expérience en dispersant une cinquantaine de grandes sculptures mises en vente par Charles Saatchi, des oeuvres d'artistes ayant rarement subi le feu des enchères. Résultat: la vente a été un flop avec peu d'oeuvres vendues, la plupart bien en-dessous des estimations.