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TOURS DE COCHONS par Adrian D@rmon
05 Mars 2014
Catégorie : News

Tout ne semble pas si bien aller dans les musées français où les rivalités entre certains conservateurs ont débouché parfois sur des intrigues plutôt néfastes comme à celui des Beaux-Arts de Tours dont la baisse de fréquentation est devenue franchement inquiétante depuis plus d'un an.

Pourtant, le musée de Tours avait été remarquablement dirigé durant plusieurs années par Philippe Le Leyzour avant qu'il ne soit soudainement remplacé en janvier 2012 par une conservatrice laquelle a voulu imposer sa marque à sa façon, sans craindre de se créer de vives inimitiés.

Les choix de programmation appliqués par cette dernière qui a fait toute sa carrière dans le même lieu ont donc finalement mené le musée dans le mur pour lui faire perdre des milliers de visiteurs en à peine une année au point d'être dépassé en terme de  fréquentation par le château de Tours, un lieu d'expositions temporaires qui bénéficie toutefois de moyens financiers cinq fois moindres.

Considéré par ses pairs comme un homme très cultivé et grand travailleur, Philippe Le Leyzour avait pour sa part réussi à proposer des expositions d'envergure alors que celles qui ont été organisées après son départ ont capté beaucoup moins de visiteurs.

Ce qui s'est passé au musée de Tours où un chargé de communication a été remercié simplement à cause d'une maladie jugée inacceptable par sa dirigeante n'a cependant pas été un cas unique en France où des guerres intestines ont souvent eu lieu au sein de diverses institutions, comme aux affaires culturelles de Bordeaux managées par une directrice, décrite selon certains comme une véritable méduse, après le départ forcé du musée des Beaux-Arts d'un conservateur qui a finalement trouvé refuge dans une autre ville de province.

Le climat dans plusieurs musées est donc devenu délétère par la faute, dit-on, de véritables psychopathes imbus de leur personne qui ont été jusqu'à terroriser leurs personnels tandis qu'on a assisté également à Paris à des séances de chaises musicales que ce soit au Musée des Arts Décoratifs, au Louvre où ailleurs.

En 2006, Le journal "Le Monde" avait déjà pointé les difficultés rencontrées par des directeurs de musées municipaux en signalant au passage que Corinne Diserens, la directrice du Musée des Beaux-Arts de Nantes, avait dû quitter son poste suite à la décision de Jean-Marc Ayrault, le maire de l'époque, de ne pas renouveler son mandat.

M. Ayrault avait choisi cette historienne de l'art et commissaire d'exposition d'origine suisse pour sa réputation internationale et son carnet d'adresses en désirant faire de sa ville un lieu branché sur la culture contemporaine sans se douter que le microcosme cultuel allait vite dénoncer une programmation élitiste ne mettant pas suffisamment en valeur le patrimoine du musée.

Le caractère bulldozer de Mme Diserens n'ayant pas permis de calmer le jeu, M. Ayrault avait donc préféré se séparer d'elle  mais son cas a finalement été loin d'être isolé en raison des multiples débats entre les tenants de l'événementiel et les défenseurs du budget des musées municipaux.

La même année, Maurice Fréchuret, le directeur du CAPC-Musée d'art contemporain de Bordeaux,  un conservateur issu de la fonction publique territoriale, avait de son côté présenté sa démission au maire UMP Hugues Martin en estimant ne pas avoir les moyens de  mener sa mission au sein du CAPC créé en 1976, sous le mandat de Jacques Chaban-Delmas, et dont le budget de fonctionnement avait alors fondu en dix ans.

Déplorant cette rigueur budgétaire, les détracteurs de M. Fréchuret avaient toutefois critiqué son manque d'ouverture et son refus souvent répété d'organiser des coproductions avec des musées étrangers.

Corinne Diserens avait vu un point commun entre l'affaire Fréchuret et la sienne pour dénoncer l'ingérence du politique et faire remarquer que les élus étaient dans un temps électoral alors que les directeurs des musées réfléchissaient sur le long terme en proposant des actions qui n'étaient pas forcément visibles, d'où des malentendus et des arbitrages politiques néfastes comme cela avait le cas à Nantes.

M. Fréchuret avait de même critiqué ces politiques exigeant des résultats rapides pour des conservateurs obligés d'être à la fois de bons gestionnaires, dirigeants, pédagogues, communicants et tout autant de bons programmateurs d'événements et d'excellents scientifiques.

Conservateur du Palais des beaux-arts de Lille de 1987 à 2003, Arnault Brejon avait également vécu les mutations du métier pour indiquer qu'une bonne alchimie était nécessaire entre un maire et son conservateur tout en notant que les collections permanentes ne suffisaient plus pour attirer le public alors que la mairie misait surtout sur les expositions temporaires pour lesquelles il avait une obligation de résultat sur certaines d'entre elles.

Il est de fait que de nombreux maires considèrent un musée municipal comme une vitrine de leur ville où il leur arrive d'organiser des visites privées en soirée ou lors de jours de fermeture, une initiative généralement peu prisée des conservateurs qui y voient quelque part une appropriation de l'espace.

De plus, la décentralisation a eu pour effet de réduire le rôle du ministère de la Culture sur le terrain au profit des collectivités locales puisque depuis janvier 2005, ce sont celles-ci qui ont payé  les conservateurs et non plus l'Etat.

En 2005, Pierre Provoyeur, le directeur du Musée Calvet d'Avignon, avait dû lui aussi  quitter ses fonctions, la ville ayant invoqué officiellement qu'elle ne pouvait maintenir son salaire de conservateur d'Etat, jugé trop élevé pour les indices d'une "petite" municipalité de 87 000 habitants.

Dans la même ville, le conservateur du Musée du Petit Palais avait été en congé-maladie durant plus d'un an et ce fut le successeur de Pierre Provoyeur qui l'avait provisoirement remplacé.

En janvier 2009, le ministère de la Culture, alors dirigé par Christine Albanel, avait pour sa part entamé une série de remaniements dans le cadre d'un programme de réorganisation et d'allègement de son budget, ce qui avait eu pour effet de faire des gagnants et des perdants.

Le ministère avait donc opté de regrouper la demi-douzaine de directions de la Culture en deux grands pôles : le patrimoine et les musées d'un côté, le spectacle et la création de l'autre.

A cette époque, Philippe Bélaval, conseiller d'Etat de 54 ans, avait ainsi pris la tête de la nouvelle vaste direction générale des patrimoines (architecture, archives, archéologie, musées et monuments).

Cet énarque, fin connaisseur du droit administratif et du sérail qui avait été précédemment directeur des archives, de l'Opéra de Paris et de la Bibliothèque nationale, eut sous son égide Marie-Christine Labourdette qui, déçue de n'avoir été nommée à sa place, avait néanmoins gardé la main sur les musées nationaux en étant notamment assistée de Pierre Provoyeur, devenu conservateur général du patrimoine et nommé à la tête d'un nouveau service, baptisé «politique muséale» mais la cohabitation entre ces derniers et Bélaval fut quelque poeu difficile.

Christine Albanel avait reconduit Thomas Grenon à  la Réunion des musées nationaux, pour accompagner Jean-Paul Cluzel, chargé de réunifier la vieille RMN avec un Grand Palais rajeuni.

En revanche, Jérôme Clément, vieux routier expérimenté, quittait le patrimoine tandis que  Martine de Boisdeffre n'avait pas été reconduite aux  archives après avoir ouvertement combattu l'absorption de sa direction dans le nouveau pôle.

Le jeu des chaises musicales a ainsi été une pratique plutôt constante dans l'univers des musées au gré des changements de ministres et de maires, les uns et les autres ne manquant de pas de nommer leurs fidèles à des postes-clés tandis que les obstacles à la relance de la décentralisation du patrimoine, ou les rivalités tant au sein du ministère qu'à celui des établissements publics, n'ont guère arrangé les choses.

Les conservateurs de musées ont donc été soumis à de multiples changements d'orientation qui ont surtout profité à ceux qui ont su nourrir d'étroites relations au sein du ministère de la Culture ou auprès de maires tandis que d'autres ont valsé du fait de leur candeur. Néanmoins, en vertu de leur statut de fonctionnaire, ces derniers ont pu se faire reclasser ailleurs ou finir dans des placards dorés, ce qui malgré tout a constitué pour les moins chanceux la vexation d'être victimes d'une réglement de comptes, comme dans le cas de ce conservateur du patrimoine aux archives départementales de Paris qui, après avoir produit des documents juridictionnels archivés en sa qualité de témoin dans l'affaire Papon, fut affecté en représailles par son chef de service, dans des fonctions subalternes et exclu des réunions de service et des permanences en bibliothèque avant d'obtenir l'annulation de cette mesure d'éviction au motif qu'elle constituait une sanction déguisée.

Au début de l'année 2010, Anne Maillard, conservatrice du musée Bossuet, avait vécu quatorze mois de « placard » suite à la décision prise le 25 septembre 2008 par le conseil municipal de Meaux de supprimer son poste et de reprendre son logement de fonction en raison d'un faible nombre de visiteurs.

En poste depuis huit ans, Anne Maillard, qui s'était retrouvée à travailler à l'office du tourisme, avait finalement obtenu sa réintégration suite à un jugement en référé tout en annonçant qu'elle comptait demander des dommages et intérêts pour les préjudices moral et matériel qu'elle avait subis.

Le 1er janvier 2011, Marie-Paule Vial, la directrice des Musées de Marseille, devait prendre les rênes du Musée de l'Orangerie pour succéder à Emmanuel Bréon, nommé tout juste deux ans auparavant.

Dans le sillage du rattachement de l'Orangerie à Orsay suite au décret présidentiel du 27 mai 2010, le ministère de la Culture, alors dirigé par Frédéric Mitterrand, avait confirmé cette nomination sur proposition de Guy Cogeval, le président du Musée d'Orsay avec qui Marie-Paule Vial avait noué une solide complicité,

Défendant avec acharnement son bilan, Bréon avait trouvé cette nomination plutôt cavalière en l'absence d'un appel à candidatures  en estimant logique de se succéder à lui-même. Ce conservateur territorial, alors en détachement jusqu'à octobre 2011, avait refusé l'invitation faite par Cogeval de rejoindre le corps des conservateurs du musée d'Orsay et de piloter un projet d'exposition d'envergure. 

Le départ de Bréon avait alors été vu comme un licenciement abusif pour les uns ou une mise au placard méritée pour les autres. En fait, sa mise à l'écart avait été due à l'organisation d'expositions paraissant hors sujet pour l'Orangerie comme « 
Les Enfants Modèles», qui comprenait beaucoup de toiles de peintres secondaires, ou celle de l'artiste contemporain Didier Paquignon qui avait reçu un accueil mitigé. Néanmoins, la qualité avait été au rendez-vous lors d'expositions coproduites avec le Musée d'Orsay comme "Paul Klee" et "Heinrich Kühn".

En janvier 2014, le quotidien "Libération" a évoqué un mélodrame à Beaubourg impliquant son président et une collaboratrice, une fête étrange à Orsay et une crise de confiance au musée Picasso pour signaler que les établissements publics donnaient du fil à retordre à Aurélie Filipetti, la ministre de la Culture.

Dès son arrivée au pouvoir, la gauche s'était ainsi débarrassée d'Isabelle Lemesle, la présidente du Centre des monuments nationaux,  laquelle avait fait l'objet d'un rapport sévère de l'inspection des affaires internes au sujet de sa gestion erratique tandis qu'Anne Baldassari avait eu droit pour sa part à des critiques du même service sans toutefois subir le même sort, le cabinet du ministère s'étant montré plutôt rassurant quant à l'avenir du musée Picasso.

A la fin de l'année 2013, le ministère avait ouvert une petite enquête sur un épisode curieux survenu au musée d'Orsay. Parfois critiqué pour son attitude envers le personnel, Guy Cogeval, son président, s'était vu épingler par le "Canard enchaîné" pour avoir fêté son mariage avec son compagnon brésilien en invitant 400 personnes dans les galeries. Le soir du 11 octobre 2013, le musée avait effectivement prêté le café et les galeries de l'exposition «Masculin-masculin» à un organisateur de soirées gays mais bien que cette soirée eusse été voulue par Cogeval, il n'en était pas formellement l'organisateur.

Le cabinet de la ministre n'avait donc pas retenu de faute de sa part pour avoir tenu une fête personnelle dans l'enceinte du musée mais avait été néanmoins surpris d'apprendre que le conseil d'administration avait prêté gracieusement les lieux et le personnel à l'organisateur privée de cette soirée sans lui réclamer aucune redevance.

Ces incidents, et d'autres restés confidentiels, ont fait tache depuis la mise en oeuvre de la politique d'autonomie des établissements à partir du début des années 2000 alors que les capacités budgétaires et stratégiques du ministère ont sérieusement été écornées depuis lors.

Manquant de véritables conseils d'administration dotés de pouvoirs effectifs, comme dans le modèle anglo-saxon, les principaux musées se sont donc transformés en grands duchés, a signalé le journal tout en ajoutant que certains dirigeants, emportés par l'ivresse de la surpuissance, étaient devenus de véritables seigneurs de guerre dont les comportements ne seraient jamais admis aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne ou en Allemagne. Affaibli, le ministère n'a de ce fait pu réagir qu'au cas par cas, faute d'une réforme d'ensemble du système.

DES DEFIS A RELEVER POUR L'ETAT

Pour sa part, l'Etat s'est montré extrêmement soucieux de modifier en profondeur ses modes de gouvernance en matière de culture en les considérant comme des leviers fondamentaux pour transformer les politiques verticales du ministère de la Culture afin de les rendre plus horizontales, principalement déconcentrées et décentralisées, moins hiérarchiques et plus axées sur les partenariats, établies davantage en connexion avec les réseaux artistiques, culturels, sociaux et économiques.

Ainsi que l'a précisé le dernier long rapport officiel titré "Ministère Nouvelle Génér@tion, Culture & Media 2020" destiné à relever le défi de la grande transformation des pratiques culturelles, ces leviers ont concerné en particulier les rapports du ministère de la Culture et de la Communication aux collectivités territoriales, avec lesquelles il a été convenu de forger un pacte nouveau et durable d'égalités territoriales. Ils ont aussi concerné les relations avec les différentes catégories d'opérateurs du ministère, culturels comme médiatiques, établissements publics aux activités différentes mais tous appelés à participer à la réalisation d'un service culturel universel sur la base de partenariats stratégiques afin que le ministère soit en mesure de porter des politiques de la culture et de la communication adaptées aux enjeux du XXIe siècle.

Le ministère a néanmoins admis que depuis une décennie, la politique culturelle se décidait davantage dans une situation où de véritables conflits pouvaient s'engager, qu'ils fussent d'ordre idéologique, politique, social ou  technologique et que de ce fait, il était donc appelé à faire des choix – y compris "d'amis, d'ennemis, d'alliés, de partenaires" – mais aussi de moyens, un aveu qui en a dit long sur ce qui se passait actuellement au sein de nombreux musées du pays.

Pour le ministère de la Culture, les politiques artistiques et culturelles de l'Etat comme celle des collectivités territoriales, ont impliqué la mise en place d'un nouveau cadre commun d'action des acteurs publics pour atteindre les objectifs d'égalités territoriales qui ne pourrait se former qu'à travers un Conseil des Collectivités Territoriales pour la Culture rénové dans ses missions, son fonctionnement, mais surtout par l'étendue de son champ et de son pouvoir d'orientation, voire de décision.

Selon son rapport, tout cela est censé passer par un renforcement des missions régaliennes de l'Etat, notamment en matière de régulations, de conservation ou d'aménagement culturel du territoire par une déconcentration accrue des politiques nationales déclinées en objectifs pluriannuels pour les DRAC et par une approche renouvelée de la mission d'équilibres des territoires à travers des stratégies pour chaque territoire, cette dernière impliquant notamment l'établissement d'une politique culturelle du Grand Paris pour les équipements qui en font la centralité et une politique d'investissements culturels dans les grandes métropoles françaises ; le partage de la centralité culturelle de l'Ile-de-France avec le reste du pays, à travers une politique de réseaux, de partenariats et en y intégrant les stratégies des établissements culturels.

A l'horizon de 2020, ce nouveau pacte entre Etat et collectivités territoriales a nécessité le besoin urgent de définir des orientations de moyen et long terme en matière de décentralisation culturelle, comme l'interruption ou la poursuite de nouvelles étapes de décentralisation en direction des régions ou départements ou communes ou agglomérations ou intercommunalités.

Le chantier a semblé vaste surtout que les rivalités entre ceux qui sont chargés du patrimoine et de sa promotion ont plutôt constitué un frein à la mise en oeuvre d'un nouveau cadre de référence.

En attendant, être conservateur de musée n'est pas de tout repos, ce que reconnaîtra sans doute Alain Seban, le président du Centre Pompidou depuis 2007 qui y a imprimé sa marque alors que sa personnalité et ses méthodes ont été souvent contestées au sein de son établissement.

Polytechnicien et énarque ayant travaillé au ministère de la Culture au temps de Philippe Douste-Blazy entre 1995 et 1997 avant de devenir conseiller pour l'éducation et de la culture du président Jacques Chirac de 2005 à 2007, Seban a dirigé le Centre Pompidou malgré son absence de formation de l'histoire de l'art, ce qui l'aurait au passage empêché de présider aux destinées du Musée d'Orsay ou du Louvre.

C'est surtout son interventionnisme qui lui a valu d'être violemment critiqué, notamment par l'Américain Robert Rubin, l'ex-président de la Fondation Centre Pompidou, et par certains conservateurs qui se sont sentis privés de leurs prérogatives en dénonçant des choix arbitraires et en se plaignant d'avoir été traités comme des moins que rien en s'entendant dire lors d'une réunion sur la stratégie de programmation tenue en septembre 2013 qu'ils ne seraient plus associés aux décisions de la présidence.

Un musée peut donc être à l'image d'un Etat dans l'Etat lorsqu'un directeur décide d'imposer ses vues sans souffrir qu'elles soient débattues. Ainsi que l'a rappelé "Le Monde" en janvier 2014, Catherine Grenier, la conservatrice et directrice adjointe du Centre Pompidou qui auparavant avait vainement brigué la présidence, a ainsi eu maille à partir avec Alain Seban en ne parvenant pas a conquérir la direction de l'institution après sept mois d'intrigues.

Alors que le contrat de Catherine Grenier venait d'être renouvelé, le président a voulu mettre fin à sa collaboration avant de se voir contredit par la ministre de la culture sans toutefois se priver de signaler qu'elle n'avait pas cessé de manifester sa volonté d'entretenir un climat d'agitation contraire à l'intérêt du service.

"Le Monde" a rapporté qu'Alain Seban avait fait des grands projets hors les murs sa priorité mais que cette mission lucrative pour le Centre Pompidou avait toutefois connu des ratés comme lors de l'exposition "Couleurs Pures" ouverte en octobre 2013 à Dhahran où deux tableaux, l'un de Dufy et  l'autre de Frantisek Kupka auraient été détériorés.

Autre reproche fait au président, son train de vie dispendieux et la mise à sa disposition de deux voitures de fonction. Selon d'anciens collaborateurs, ses frais auraient été bien supérieurs à ceux d'autres présidents d'établissement publics. 

Le journal a ajouté qu'en comparaison, le président du Louvre, Jean-Luc Martinez qui lui aussi a imposé ses vues à sa manière, ne disposait pas de frais de représentation et n'organisait que des déjeuners à moins de 20 euros par personne dans une salle à manger située dans l'enceinte du musée.

Mais ce qui a fait débat a été surtout le style de management de Seban, considéré comme une machine de travail qui a mis de côté tout ce qui était humain en poussant les gens à aller au-delà de leurs limites.

Son ancien chauffeur a ainsi fini en dépression après l'avoir conduit pendant quatre ans pour des déplacements parfois anodins, de son appartement de fonction à son bureau de la rue Brantôme en devant aussi promener son chien jusqu'au jour où ce dernier ne l'a plus supporté.

Dans un rapport d'activité 2011, le médecin de la prévention a notamment signalé que le nombre d'agents du Centre Pompidou orientés vers une prise en charge psychologique était passé de 5 à 40 en trois ans pour pointer alors que le risque psychosocial était bien présent au musée  par le biais des différentes contraintes mentales qui pesaient à des degrés divers sur la quasi-totalité de ces derniers. Par ailleurs, la tentative de suicide d'un autre agent du service informatique du Centre Pompidou aurait été considérée comme accident du travail par le Tribunal des affaires sociales.

Il y a eu au musée 70 emplois perdus depuis 2010 dus en grande partie à une forte diminution de la subvention publique durant ces dernières années tandis que les syndicats ont dénoncé la brutalité de la direction en notant que depuis 2007, il y avait eu 9 conseils de discipline avec mises à pied et licenciements secs, du jamais vu depuis sa création.

D'autre part, une conservatrice a vu  sa prime dite «de responsabilité» être réduite pour avoir réclamé plus d'agents d'accueil dans une exposition tandis que trois à quatre cadres se sont succédé à la direction des ressources humaines, à celle bâtiment et sécurité, à la direction juridique et financière ou à l'agence comptable. Plus récemment, le directeur des publics a reçu une lettre de cessation anticipée de détachement, sans aucun motif.

Rares sont donc les musées où règne l'harmonie entre les directeurs et leurs employés du fait de différences de vues, de jalousies et de médisances de toutes sortes nées de cette sempiternelle question de frustration toutefois omniprésente dans bien d'autres domaines, que ce soit  ceux de la politique, de  la vie associative, des affaires, du sport, du théâtre, du journalisme, de la communauté scientifique, de la médecine, du voisinage, etc.

Tout directeur de musée se verra donc automatiquement contesté tout en sachant que sa position de chef implique naturellement d'avoir des ennemis, indépendamment du fait qu'on puisse se montrer aimable et prévenant à l'égard de son personnel ou au contraire odieux, ce qui n'est malencontreusement pas rare si on prend la grosse tête ou si on s'entoure de favoris choisis dans un cercle d'intimes qui poussent alors d'autres conservateurs en place au placard.

Cela dit, on peut même être admiré de ses ennemis, comme cela a été le cas de Bernard Blistène, jugé roué par ses rivaux. Devenu en novembre 2013 directeur du Musée national d'art moderne (MNAM) sur proposition d'Alain Seban, Blistène a été jusqu'à épater ces derniers en déployant une curiosité tout-terrain et en sachant rester attentif aux avant-gardes les plus pointues de l'art contemporain.

Comme dans d'autres domaines, les compétences et la gentillesse ne servent donc souvent à pas grand chose lorsqu'on a face à soi des experts dans l'art de l'intrigue qui ont le don de s'assurer des protections, ce que beaucoup de conservateurs ne parviennent pas à développer, soucieux qu'ils sont de bien faire leur métier avant tout, ce qui malheureusement les rend vulnérables.

On en aura donc pas fini avec ces rivalités qui empoisonnent les musées depuis en fait des siècles et font que les nominations des uns déplaisent forcément aux autres. La courtisanerie s'est ainsi manifestée de tous temps et comme la nature humaine n'est pas près de changer, il en sera ainsi pour l'éternité.

Adrian Darmon

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