Dans son livre "The Art of the
Con", Anthony Amore relate les plus grosses affaires de faux de vols et d'escroqueries qui ont secoué le
monde de l'art depuis un siècle.
Principal enquêteur dans l'affaire du vol commis
au Musée Isabella Gardner de Boston qui a défrayé la chronique depuis plus de
20 ans, Amore a expliqué les tenants et les aboutissants de plusieurs cas
retentissants concernant des faussaires et des escrocs qui ont réussi à duper
des collectionneurs ou des spécialistes soi-disant avisés.
Il a ainsi exploré les différentes manières
de procéder de la part de ces petits malins qui sont parfois parvenus à amasser des
fortunes par le biais de faux ou d'escroqueries de grande envergure comme celle du galeriste américain
Larry Salander qui avait vendu plusieurs fois un même tableau avant de finir en
prison après s'être joué de la crédulité de ses clients.
Les faussaires ou les escrocs sont en
général de fins psychologues aptes à faire passer des vessies pour des
lanternes à leurs interlocuteurs à travers un tas de ruses savamment mises au point en sachant que
plus une histoire est insensée plus un quidam sera tenté d'y croire.
Les grands faussaires ont ainsi eu la
particularité d'inventer des provenances prétendument en béton pour leurs plagiats en racontant
qu'ils avaient redécouvert des oeuvres oubliées depuis des lustres et plus d'un
naïf s'est laissé prendre à leur discours en omettant de faire des vérifications
qui lui aurait permis de ne pas se laisser abuser.
A cet égard, Amore a cité le cas du scandale
de la galerie Knoedler qui avait vendu nombre d'oeuvres d'artistes
expressionnistes-abstraits provenant de la collection de "M.X et de son
fils" sans chercher à déterminer de qui il s'agissait vraiment alors que
ces toiles étaient produites par un talentueux artiste chinois installé dans le
quartier de Queens à New York lequel n'avait touché que des clopinettes alors
qu'elles étaient cédées pour des millions de dollars.
Il a évoqué également le cas du fameux
capitaine John E. Swords, un marchand de Philadelphie qui au 19e siècle avait
incité le peintre Gilbert Stuart à réaliser un portrait de George Washington en
lui demandant d'en faire une copie pour l'offrir à un ami en Virginie avant de
filer en Chine où il trouva des artistes assez doués pour produire une centaine
de plagiats qu'il revendit en grande partie à son retour aux Etats-Unis où on
estime qu'entre 1/5e et 1/10e des oeuvres ornant des demeures de l'est du pays
du 19e siècle provient de Chine.
Averti du manège du capitaine indélicat,
Stuart le poursuivit en justice pour le forcer à le cesser et à rendre les
plagiats, a indiqué Amore en ajoutant dans un autre chapitre de son livre qu'une
marchande avait fait réaliser la copie d'un Picasso pour la vendre ensuite
comme authentique, un abus déjoué plus tard par un expert qui, mis en présence des deux
toiles, se rendit finalement compte de la supercherie.
Les affaires de faux ont pullulé depuis plus
de 150 ans que ce soit dans les domaines de l'archéologie, des meubles, des
objets d'art ou de la peinture à partir du moment où le nombre des
collectionneurs commença à augmenter considérablement.
Entre l'orfèvre Rouchomovsky qui trompa les
spécialistes du Louvre avec une magnifique tiare soi-disant scythe et les
faussaires qui s'ingénièrent à produire des plagiats de grands maîtres, il y
aurait en fait de quoi remplir des volumes.
Ces derniers ont toujours misé sur la
cupidité des collectionneurs et sur leur manque de connaissances pour avoir
souvent un coup d'avance sur les experts comme Van Meegeren qui produisit des
faux Vermeer avant et pendant la Seconde Guerre Mondiale qui aujourd'hui
auraient du mal à passer comme authentiques tout comme les plagiats d'Elmyr de
Hory ou de Real Lessart considérés aujoud'hui comme de pauvres pastiches qui atterrirent
entre les mains de millionnaires américains plutôt candides après avoir été
trompés par Fernand Legros, un ancien danseur classique devenu courtier.
Le plus grand des faussaires aura été
Wolfgang Beltracci, emprisonné en Allemagne après avoir écoulé une cinquantaine
d'oeuvres expressionnistes ou modernes qui lui avaient rapporté la bagatelle de
plus de 40 millions d'euros que des maisons de vente comme Lempertz à Cologne
et plusieurs galeristes ont acheté et revendu comme authentiques sur la foi
d'une provenance bidon, celle du fameux marchand Alfred Flechtheim dont
l'étiquette trafiquée était apposée au dos de ses plagiats, ce qui l'a
finalement perdu tout comme l'analyse d'un tableau de Campendonck comportant
des pigments qui n'existaient pas en 1915.
Fort de sa notoriété, Beltracci, qui avait
réussi à tromper l'expert Werner Spiess pour au moins sept faux tableaux de Max Ernst, s'est désormais mis à vendre ses propres oeuvres dans
une galerie de Munich où elles sont proposées à des prix se situant entre 7000
et 70 000 euros, comme quoi le faux peut mener au succès à condition d'en
sortir pour de bon.