Gagnant vendredi, perdant la semaine suivante. «Michaël le puits de science» a vu de nombreux rêves s'envoler en l'espace de quelques jours. Après des mois d'attente angoissante, il vient donc d'être informé qu'il n'aurait finalement pas de certificat d'authenticité pour le tableau moderne qui devait lui rapporter un gros paquet d'argent. Pourtant, son contact dans les hautes sphères du marché de l'art lui avait assuré que l'obtention de ce certificat n'était plus qu'une formalité. Deux jours plus tard, autre refus et nouveau coup de bambou, cette fois pour une huile et une aquarelle qui semblaient bien être de Cézanne. Le choc est rude car il pensait avoir mis tous les atouts de son côté en bénéficiant de l'aide d'un gros ponte du marché qui, tout comme lui, estimait que le cachet exceptionnel de ces œuvres était susceptible de lui garantir un certificat ouvrant la porte à un gain mirifique.
«Il ne me reste plus qu'à tenter de gagner la cagnotte de 100 millions promise au gagnant du tirage spécial organisé pour le 25e anniversaire du Loto», me dit-il d'un ton désabusé.
Je lui signale toutefois qu'il n'a pas tout perdu puisque certaines de ses dernières trouvailles devraient lui rapporter quelques centaines de milliers de francs.
«Certes, mais cela ne représente pas grand chose par rapport à ce tableau abstrait et à ces deux œuvres, à mon avis de Cézanne, qui auraient pu me faire récolter plusieurs millions. Ces certificats refusés m'ont rendu terriblement amer et dégoûté», me répond-il l'air abattu.
Cela faisait des mois qu'on lui avait laissé espérer un certificat pour son tableau abstrait et le seul obstacle à lever se situait au niveau de sa provenance. C'est sur ce point que tout s'est écroulé alors que les deux œuvres qui auraient pu être de Cézanne ont été rejetées en moins de cinq minutes.
Maintenant que ses espoirs ont été balayés, Michaël se sent subitement las et ressemble à un boxeur sonné. Il fait peine à voir et j'ai beau l'exhorter à se ressaisir, rien n'y fait mais je sais que la vie d'un chineur invétéré est faite de multiples rebondissements et qu'un de ces quatre matins il arborera un sourire triomphant…
Vendredi 18 mai, toujours rien à signaler au marché aux Puces de Saint-Ouen où les marchands sont de plus en plus nombreux à affirmer que leur métier est foutu.
En attendant, la moindre pièce intéressante qui s'offre aux yeux des chineurs suscite d'impensables bagarres pour se l'approprier, de la même manière qu'à Drouot où là encore, la bonne marchandise manque cruellement.