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L'art est un phare pour le monde
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Le journal d'un fou d'art
Les fous d'art, ivres de savoir et de découvertes, riches ou moins nantis et sans cesse à l'affût des nouvelles relatives au marché de l'art, forment une belle légion à travers le monde. Sans eux, ce marché n'aurait donc sûrement rien de légendaire. Depuis plus d'une quinzaine d'années, Adrian Darmon a donc rassemblé à travers plus de 2200 pages de multiples anecdotes souvent croustillantes sur les chineurs, amateurs et autres acteurs de cet univers plutôt incroyable et parfois impitoyable.
VIIème Chapitre
HERNIE FISCALE…
01 Avril 2001 |
Cet article se compose de 2 pages.
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Samedi 31 mars, je croise un collectionneur habitué de Drouot qui me fait part de son irritation suite à l'achat dans une vente d'une miniature bidon. L'expert de la vente avait présenté cette miniature comme étant d'époque Napoléon III tout en signalant qu'elle était signée «Autissier», un miniaturiste du début du XIXe siècle. Le collectionneur l'a acquise pour 9000 FF pour s'apercevoir ensuite qu'il ne s'agissait pas d'une œuvre de l'artiste en question. Il me demande s'il a des chances de se faire rembourser mais je lui signale que l'expert n'a pas commis de faute puisque lors de la vente il a indiqué l'époque supposée de sa réalisation. «Oui, mais il a néanmoins mentionné «signé Autissier» et je considère cela comme une tromperie», rétorque le collectionneur. «Que nenni ! Il n'a pas omis de stipuler qu'elle était d'époque Napoléon III et ne va pas manquer de rappeler cette précision si vous demandez à annuler la vente», me permets-je de lui souligner en ajoutant qu'il ne lui sera pas facile d'obtenir satisfaction. Il maugrée quelque peu puis change de sujet pour me parler des prix dingues enregistrés à Drouot avant de me révéler que les inspecteurs du fisc hantent de plus en plus les salles de l'hôtel de vente pour surveiller certains gros acheteurs en vue de déterminer si leur frénésie d'achats correspond à leur fortune déclarée. Il ajoute que le passage à l'euro en février 2002 va bientôt pousser des milliers de personnes à aller changer de gros paquets en argent liquide souvent non déclarés. Voilà un peu pourquoi le fisc a pris les devants en faisant placarder dans tout l'Hôtel Drouot des affiches stipulant que tout paiement en espèces ne doit pas dépasser dix mille francs. Bonjour la prochaine ruée chez les agents de change qui sont d'habitude plus laxistes que les banques lorsqu'un quidam se pointent chez eux avec de grosses sommes… Quelques heures plus tard, un ami journaliste me fait part de l'accroissement brutal des faillites de sites d'art sur Internet. J'ai déjà appris que le site artface.com a déposé le bilan y a quelques jours. Maintenant, je viens d'être informé que c'est au tour d'oraos.com d'être sur le point de connaître pareil sort. Le secteur de l'Internet traverse actuellement une très mauvaise passe, ce qui a conduit de nombreuses start-ups à couler durant ces derniers mois mais je ne puis m'empêcher de répondre à ce journaliste que ces déconfitures ne sont pas toutes dues à la frilosité des investisseurs qui s'est manifestée dans le domaine du Web depuis la chute du Nasdaq à New York. Cela m'amène alors à préciser que de nombreux créateurs de sites d'art, qui se sont montrés doués pour produire d'excellents business plans afin de lever de gros capitaux, n'avaient en fait pas les compétences requises pour mener correctement leurs projets. Portés par la vague d'euphorie ayant submergé le monde de l'Internet durant 1999, ils ont brièvement fait illusion avant de se planter piteusement. Les gens qui ont créé artface.com étaient des golden boys qui avaient réussi de beaux coups à la Bourse lorsque les valeurs progressaient à un rythme démentiel. Une fois confrontés aux problèmes de fond du domaine de l'art, où la connaissance joue souvent un rôle primordial, ils ont fini droit dans le mur dès lors que la crise économique s'est installée aux Etats-Unis et en Europe.
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Samedi 31 mars, je croise un collectionneur habitué de Drouot qui me fait part de son irritation suite à l'achat dans une vente d'une miniature bidon. L'expert de la vente avait présenté cette miniature comme étant d'époque Napoléon III tout en signalant qu'elle était signée «Autissier», un miniaturiste du début du XIXe siècle. Le collectionneur l'a acquise pour 9000 FF pour s'apercevoir ensuite qu'il ne s'agissait pas d'une œuvre de l'artiste en question. Il me demande s'il a des chances de se faire rembourser mais je lui signale que l'expert n'a pas commis de faute puisque lors de la vente il a indiqué l'époque supposée de sa réalisation. «Oui, mais il a néanmoins mentionné «signé Autissier» et je considère cela comme une tromperie», rétorque le collectionneur. «Que nenni ! Il n'a pas omis de stipuler qu'elle était d'époque Napoléon III et ne va pas manquer de rappeler cette précision si vous demandez à annuler la vente», me permets-je de lui souligner en ajoutant qu'il ne lui sera pas facile d'obtenir satisfaction. Il maugrée quelque peu puis change de sujet pour me parler des prix dingues enregistrés à Drouot avant de me révéler que les inspecteurs du fisc hantent de plus en plus les salles de l'hôtel de vente pour surveiller certains gros acheteurs en vue de déterminer si leur frénésie d'achats correspond à leur fortune déclarée. Il ajoute que le passage à l'euro en février 2002 va bientôt pousser des milliers de personnes à aller changer de gros paquets en argent liquide souvent non déclarés. Voilà un peu pourquoi le fisc a pris les devants en faisant placarder dans tout l'Hôtel Drouot des affiches stipulant que tout paiement en espèces ne doit pas dépasser dix mille francs. Bonjour la prochaine ruée chez les agents de change qui sont d'habitude plus laxistes que les banques lorsqu'un quidam se pointent chez eux avec de grosses sommes… Quelques heures plus tard, un ami journaliste me fait part de l'accroissement brutal des faillites de sites d'art sur Internet. J'ai déjà appris que le site artface.com a déposé le bilan y a quelques jours. Maintenant, je viens d'être informé que c'est au tour d'oraos.com d'être sur le point de connaître pareil sort. Le secteur de l'Internet traverse actuellement une très mauvaise passe, ce qui a conduit de nombreuses start-ups à couler durant ces derniers mois mais je ne puis m'empêcher de répondre à ce journaliste que ces déconfitures ne sont pas toutes dues à la frilosité des investisseurs qui s'est manifestée dans le domaine du Web depuis la chute du Nasdaq à New York. Cela m'amène alors à préciser que de nombreux créateurs de sites d'art, qui se sont montrés doués pour produire d'excellents business plans afin de lever de gros capitaux, n'avaient en fait pas les compétences requises pour mener correctement leurs projets. Portés par la vague d'euphorie ayant submergé le monde de l'Internet durant 1999, ils ont brièvement fait illusion avant de se planter piteusement. Les gens qui ont créé artface.com étaient des golden boys qui avaient réussi de beaux coups à la Bourse lorsque les valeurs progressaient à un rythme démentiel. Une fois confrontés aux problèmes de fond du domaine de l'art, où la connaissance joue souvent un rôle primordial, ils ont fini droit dans le mur dès lors que la crise économique s'est installée aux Etats-Unis et en Europe.
De leur côté, ceux d'oraos.com s'étaient inspirés sans vergogne d'un projet que j'avais au départ élaboré pour développer artcult.com, mais ils croyaient naïvement produire un contenu supérieur en quantité et en qualité en faisant appel à divers collaborateurs ayant acquis une expérience dans l'édition d'art. Ils n'avaient cependant pas imaginé qu'ils ne maîtriseraient pas leur jouet après n'avoir pas lésiné sur les dépenses en constituant finalement une sorte de tour de Babel avec une équipe hétéroclite peu expérimentée dans le domaine de l'information pure. Résultat : avec trois fois moins de visiteurs que ceux enregistrés par artcult.com et avec un contenu insipide, oraos.com n'a jamais pu décoller tout en engloutissant la bagatelle de 14 millions de FF en une année alors que mon site, créé en janvier 1996, continue de se développer gentiment avec l'aide de partenaires dont la confiance repose sur ma longue expérience dans le secteur de l'art. Je me permets d'ajouter à l'adresse de mon interlocuteur que la disparition de certains sites a quelque part le mérite de dégager l'horizon et de laisser ainsi la voie libre aux meilleurs. C'est en quelque sorte une forme de sélection naturelle qui se déroule maintenant sur le Web du fait de la crise qui, cela dit, fait souffrir tout le monde… Dimanche 1er avril, déjeuner avec Chester Fielx qui s'est pointé à 4 heures du matin à la foire de l'hippodrome de Vincennes. Il n'y a vu qu'une petite huile tardive de Guillaumin que l'ami qui l'accompagnait a achetée pour mille francs alors que sur le même stand, un autre chineur a acheté une autre œuvre de ce peintre pour pareille somme. Apparemment, ce sont les seuls petits coups qui ont réalisés parmi plus de 1000 exposants.
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