Encore une affaire plaidée devant un tribunal le 21 février 2001, cette fois-ci concernant une gouache intitulée «Cavaliers au Bois» vendue pour 104 000 FF en mars 1990 à Drouot comme étant de Jean Dufy, le frère de Raoul. On a ainsi appris que sept ans plus tard, Jacques Bailly, auteur du catalogue raisonné de l'artiste, avait considéré cette gouache comme fausse. Résultat : l'acquéreur s'était retourné contre les commissaires-priseurs Chayette et Calmels et l'expert en charge de cette vente pour se faire rembourser.
Là où le bât blesse c'est que les vendeurs n'étaient autres que la belle-soeur de Mme Calmels et l'expert de la vente dont le défenseur n'a pas manqué de fustiger le rapport de contre-expertise en argumentant qu'il ne s'appuyait que sur les dires de Jacques Bailly avant de soulever le problème de la toute puissance des auteurs de catalogues raisonnés.
On ne peut nier que ces derniers disposent d'un pouvoir exorbitant qui n'a pas manqué d'être battu en brèche dernièrement par certains amateurs à qui on a fait savoir que leurs acquisitions ne figureraient pas dans les catalogues raisonnés des artistes dont ils avaient acquis des oeuvres. Tel a été le cas pour des acheteurs de pièces signées par Modigliani qui par la suite ont cependant pu obtenir gain de cause devant la justice.
Autre problème évoqué : le choix des experts par les juges car ceux-ci n'ont pas toujours les compétences voulues pour apporter des avis. Ainsi, celui qui a estimé que la gouache de Dufy était fausse est lui-même par ailleurs sur la sellette après avoir garanti l'authenticité d'une aquarelle de Vlaminck qui n'était qu'une reproduction.
Le fait que l'expert de la vente de mars 1990 était le co-vendeur de cette gouache litigieuse n'est pas répréhensible en soi puisque la loi permet jusqu'à présent une telle pratique laquelle n'aura cependant plus cours lorsque la réforme des ventes publiques entrera en vigueur à la fin de l'année.
En attendant, ce micmac judiciaire démontre à l'évidence que les expertises peuvent être fragiles puisqu'elles peuvent être remises en cause à tout moment, surtout celles qui sont faites dans le cadre de ventes aux enchères. On se demande donc à qui se fier, ce qui me conforte dans l'opinion selon laquelle il serait temps de faire authentifier des œuvres par un jury sélectionné qui aurait certainement plus de poids qu'un homme seul dont le jugement pourrait ne pas être fiable à 100%.
Dimanche ensoleillé mais froid à Paul Bert où un marchand m'apprend qu'un de ses collègues a vendu pour 3000 FF il y a quelques mois ce qu'il pensait être la copie d'un petit primitif italien peint sur fond or. L'acquéreur de cette œuvre vient de la revendre pour 500 000 FF. Jolie plus-value pour l'un et belle bourde pour l'autre….