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La Bourse est à l'image d'un aéroport avec ses gros et petits porteurs mais aussi parfois des crashs en bout de piste
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Le journal d'un fou d'art
Les fous d'art, ivres de savoir et de découvertes, riches ou moins nantis et sans cesse à l'affût des nouvelles relatives au marché de l'art, forment une belle légion à travers le monde. Sans eux, ce marché n'aurait donc sûrement rien de légendaire. Depuis plus d'une quinzaine d'années, Adrian Darmon a donc rassemblé à travers plus de 2200 pages de multiples anecdotes souvent croustillantes sur les chineurs, amateurs et autres acteurs de cet univers plutôt incroyable et parfois impitoyable.
VIème Chapitre
ENCORE UN COUP FUMANT DE CHESTER FIELX …
01 Mars 2001 |
Cet article se compose de 2 pages.
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Jeudi 1er mars, virée au Bourget pour une nouvelle foire d'antiquités. Le hall d'exposition est clairsemé car le mauvais temps qui règne dans le sud de la France, a empêché de nombreux marchands de venir y déballer leur camelote. J'erre de stand en stand en compagnie de mon assistant sans voir un seul truc valable à la ronde et me mets à pester de n'être pas resté sagement au lit pour récupérer d'une intense fatigue due à une début de grippe. Le niveau de cette foire, qui attire encore des milliers d'acheteurs, baisse à chaque nouvelle édition alors que d'un autre côté, le nombre de «pompes» présentées ne cesse d'augmenter. C'est là un fait irrémédiable. Alors que les chineurs s'agglutinent instantanément comme des mouches autour de tout objet ou tableau qui semble sortir de l'ordinaire, je tombe à huit heures tapantes sur Chester Fielx qui a finalement décidé de venir au dernier moment après avoir été brutalement titillé par le réflexe de la découverte à faire. Il arbore néanmoins une mine renfrognée, n'ayant rien déniché au cours d'une chasse commencée une heure plus tôt. Son désarroi n'est en fait que passager puisqu'il ne se circonscrit qu'à cette matinée de chine. En fait, depuis la vente de son autoportrait de Corot, il n'arrête pas d'acheter de bonnes pièces comme ce paysage de Hollande peint par Maximilien Luce, acquis pour 40 000 FF il y a 48 heures, qu'il m'affirme pouvoir revendre instantanément 50% plus cher. Pour ne pas être reste, il vient de confier à Sotheby's un dessin de Burne-Jones, acheté 40 FF comme pièce encadrée à Drouot par «Dédé de Montreuil» puis revendu par ce dernier à «Youki» qui le lui a ensuite cédé pour trois fois rien. L'authentification de ce dessin réalisé par ce maître du préraphaélisme semble en bonne voie et Chester espère en tirer la bagatelle de 600 000 FF aux enchères. Encore un coup fumant de plus à son actif après l'autoportrait de Corot, le bouquet de fleurs de Lovis Corinth acheté 300 FF dans un marché aux Puces, le paysage acquis pour 200 FF à Bruxelles qu'il pense être également de Corot et un tableau de Lebourg qu'il doit présenter à l'Institut Wildenstein pour obtenir un certificat d'authenticité ce matin-même.
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Jeudi 1er mars, virée au Bourget pour une nouvelle foire d'antiquités. Le hall d'exposition est clairsemé car le mauvais temps qui règne dans le sud de la France, a empêché de nombreux marchands de venir y déballer leur camelote. J'erre de stand en stand en compagnie de mon assistant sans voir un seul truc valable à la ronde et me mets à pester de n'être pas resté sagement au lit pour récupérer d'une intense fatigue due à une début de grippe. Le niveau de cette foire, qui attire encore des milliers d'acheteurs, baisse à chaque nouvelle édition alors que d'un autre côté, le nombre de «pompes» présentées ne cesse d'augmenter. C'est là un fait irrémédiable. Alors que les chineurs s'agglutinent instantanément comme des mouches autour de tout objet ou tableau qui semble sortir de l'ordinaire, je tombe à huit heures tapantes sur Chester Fielx qui a finalement décidé de venir au dernier moment après avoir été brutalement titillé par le réflexe de la découverte à faire. Il arbore néanmoins une mine renfrognée, n'ayant rien déniché au cours d'une chasse commencée une heure plus tôt. Son désarroi n'est en fait que passager puisqu'il ne se circonscrit qu'à cette matinée de chine. En fait, depuis la vente de son autoportrait de Corot, il n'arrête pas d'acheter de bonnes pièces comme ce paysage de Hollande peint par Maximilien Luce, acquis pour 40 000 FF il y a 48 heures, qu'il m'affirme pouvoir revendre instantanément 50% plus cher. Pour ne pas être reste, il vient de confier à Sotheby's un dessin de Burne-Jones, acheté 40 FF comme pièce encadrée à Drouot par «Dédé de Montreuil» puis revendu par ce dernier à «Youki» qui le lui a ensuite cédé pour trois fois rien. L'authentification de ce dessin réalisé par ce maître du préraphaélisme semble en bonne voie et Chester espère en tirer la bagatelle de 600 000 FF aux enchères. Encore un coup fumant de plus à son actif après l'autoportrait de Corot, le bouquet de fleurs de Lovis Corinth acheté 300 FF dans un marché aux Puces, le paysage acquis pour 200 FF à Bruxelles qu'il pense être également de Corot et un tableau de Lebourg qu'il doit présenter à l'Institut Wildenstein pour obtenir un certificat d'authenticité ce matin-même.
Bref, cet heureux chineur semble béni des dieux en ce moment alors que d'autres rament en vain vers des îles aux trésors encore introuvables. Le hasard fait finalement quand même bien les choses si je songe qu'il y a à peine 48 heures j'ai enfin trouvé de quelle nationalité était le peintre David Friedmann qui figure dans l'encyclopédie des artistes juifs que je m'apprête à publier. Or voilà qu'au moment de quitter cette foire, je découvre posé parterre un tableau représentant deux femmes nues peint par ce peintre tchèque durant les années 1930. Le brocanteur en désire 1000 FF et me déclare ne pas savoir qui peut être ce Friedmann. On saura maintenant qu'il travaillait à Berlin et probablement à Paris, qu'il fut arrêté par les nazis puis déporté et qu'il poursuivit ensuite sa carrière à Prague après avoir survécu à l'Holocauste. Tableau de David Friedmann trouvé au Bourget
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