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Il ne faut pas prendre les gens pour des cons, même si on sait qu'ils le sont (Les Inconnus)
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Le journal d'un fou d'art
Les fous d'art, ivres de savoir et de découvertes, riches ou moins nantis et sans cesse à l'affût des nouvelles relatives au marché de l'art, forment une belle légion à travers le monde. Sans eux, ce marché n'aurait donc sûrement rien de légendaire. Depuis plus d'une quinzaine d'années, Adrian Darmon a donc rassemblé à travers plus de 2200 pages de multiples anecdotes souvent croustillantes sur les chineurs, amateurs et autres acteurs de cet univers plutôt incroyable et parfois impitoyable.
Xème Chapitre
LES PUCES DE MARSEILLE: PAS DE QUOI SE GRATTER
01 Août 2001 |
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Samedi 25 août, visite du marché aux Puces de Marseille où il n'y a malheureusement rien à découvrir. De la drouille à perte de vue dans un véritable souk surtout bondé de pièces détachées de toutes sortes. De quoi mourir de déception sous un soleil de plomb. Il est vrai que nous sommes encore en période de vacances et que la plupart des brocanteurs n'ont pas repris leurs activités. Soit, mais même à Vanves ou à Saint-Ouen, il y a quand même un petit os à ronger en août. La reprise aura lieu à Lille le premier dimanche de septembre dans un climat qui s'annonce néanmoins morose selon les sondages publiés dans la presse. L'économie mondiale bat de l'aile et les Français sont de plus en plus inquiets pour l'avenir. Cela semble dur d'être plongé dans la crise sans bouteille à oxygène et tant que la Bourse donnera des signes d'essoufflement il n'y aura guère d'espoir de sortir la tête hors de l'eau. La rentrée sera donc cruciale pour avoir une idée de la température mais le monde ne va pas s'arrêter de tourner pour autant même si l'embrayage de l'économie patine salement dans l'attente d'un coup de fouet salutaire. Il a suffi d'un naufrage de la nouvelle économie pour que tout se dérègle aux Etats-Unis puis en Europe et il faudra du temps pour s'en remettre avant de repartir de l'avant. Comme les choses vont de plus en plus vite, le cycle des crises s'accélère tout autant que celui des reprises économiques. C'est là une loi à laquelle il va falloir se soumettre tant dans le domaine de l'art qu'ailleurs mais dans le cadre de ce système fluctuant , nous sommes encore loin de revivre la crise de 1929 avec ses cortèges de désastres. N'empêche, le spectre de celle-ci plane sur nos têtes et il suffirait d'une guerre au Proche-Orient et par contrecoup d'une flambée des prix du pétrole pour aller droit dans le mur. Le monde ne parvient toujours pas à tirer les leçons d'une crise surtout qu'une fois qu'elle est jugulée, une autre se dessine avec des contours différents. Un jour, c'est le décalage entre la production et la consommation, un autre c'est l'inflation, le chômage ou la mondialisation ou encore le fossé qui s'élargit entre le Nord et le Sud ou bien les tensions au Proche-Orient. Demain, ce sera la rivalité avec la Chine, la pollution à l'échelle de la planète ou la situation catastrophique en Russie. Bref, la crise est souvent à l'image de ces virus informatiques qui deviennent sans cesse plus pernicieux pour les utilisateurs d'ordinateurs. Pour résumer, il faudra toujours s'accommoder du bien et du mal en dépit de toutes les précautions que les économistes s'évertuent à prendre quoique dans le domaine de l'art, on sait bien que les pièces exceptionnelles continueront de s'arracher à des prix exorbitants et que tout ce qui ne l'est pas pâtira de la crise. A ce jeu-là, les riches deviennent plus riches surtout dans le domaine des tableaux et des dessins anciens, des objets d'art prestigieux et d'autres qui restent à la mode. Le problème est que comme dans le secteur des start-ups, on a étendu le terrain d'action à l'art contemporain où il y a à boire et à manger et surtout à se payer de drôles d'indigestions une fois que l'engouement sera passé. C'est dans ce domaine que la casse risque d'être importante surtout qu'entre un Jeff Koons et un Rembrandt, il n'y a vraiment pas photo. Les prix délirants enregistrés ces trois dernières années pour nombre d'artistes contemporains pourraient ainsi retomber comme un soufflé d'ici peu alors que personne ne s'est encore avisé de faire un point salutaire. Tant que vous y êtes achetez des œuvres de Erro, un pionnier du Pop Art trop délaissé, plutôt que du Warhol qui fut son imitateur au point même de le plagier sans vergogne. Il est vraiment dommage que cet artiste, né en Islande, n'ait pas été lancé par Leo Castelli, l'homme qui a permis à l'art contemporain américain de faire la nique aux créateurs de la vieille Europe. Depuis la Seconde Guerre Mondiale, les Etats-Unis ont annexé l'art de notre temps à leur profit après avoir instauré leur hégémonie sur le plan économique, envahi la planète avec leurs chaînes de fast-food et décrété que le camembert ou le roquefort n'avaient plus le droit de titiller les palais de leurs citoyens. A trop vouloir tirer sur la corde des cotes de leurs artistes contemporains, les Américains risquent de la distendre et de la casser et comme rien ne vient freiner le rythme démentiel des hausses pour l'instant, le scénario-catastrophe ne manquera pas de se produire un jour ou l'autre. A bon entendeur…
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Samedi 25 août, visite du marché aux Puces de Marseille où il n'y a malheureusement rien à découvrir. De la drouille à perte de vue dans un véritable souk surtout bondé de pièces détachées de toutes sortes. De quoi mourir de déception sous un soleil de plomb. Il est vrai que nous sommes encore en période de vacances et que la plupart des brocanteurs n'ont pas repris leurs activités. Soit, mais même à Vanves ou à Saint-Ouen, il y a quand même un petit os à ronger en août. La reprise aura lieu à Lille le premier dimanche de septembre dans un climat qui s'annonce néanmoins morose selon les sondages publiés dans la presse. L'économie mondiale bat de l'aile et les Français sont de plus en plus inquiets pour l'avenir. Cela semble dur d'être plongé dans la crise sans bouteille à oxygène et tant que la Bourse donnera des signes d'essoufflement il n'y aura guère d'espoir de sortir la tête hors de l'eau. La rentrée sera donc cruciale pour avoir une idée de la température mais le monde ne va pas s'arrêter de tourner pour autant même si l'embrayage de l'économie patine salement dans l'attente d'un coup de fouet salutaire. Il a suffi d'un naufrage de la nouvelle économie pour que tout se dérègle aux Etats-Unis puis en Europe et il faudra du temps pour s'en remettre avant de repartir de l'avant. Comme les choses vont de plus en plus vite, le cycle des crises s'accélère tout autant que celui des reprises économiques. C'est là une loi à laquelle il va falloir se soumettre tant dans le domaine de l'art qu'ailleurs mais dans le cadre de ce système fluctuant , nous sommes encore loin de revivre la crise de 1929 avec ses cortèges de désastres. N'empêche, le spectre de celle-ci plane sur nos têtes et il suffirait d'une guerre au Proche-Orient et par contrecoup d'une flambée des prix du pétrole pour aller droit dans le mur. Le monde ne parvient toujours pas à tirer les leçons d'une crise surtout qu'une fois qu'elle est jugulée, une autre se dessine avec des contours différents. Un jour, c'est le décalage entre la production et la consommation, un autre c'est l'inflation, le chômage ou la mondialisation ou encore le fossé qui s'élargit entre le Nord et le Sud ou bien les tensions au Proche-Orient. Demain, ce sera la rivalité avec la Chine, la pollution à l'échelle de la planète ou la situation catastrophique en Russie. Bref, la crise est souvent à l'image de ces virus informatiques qui deviennent sans cesse plus pernicieux pour les utilisateurs d'ordinateurs. Pour résumer, il faudra toujours s'accommoder du bien et du mal en dépit de toutes les précautions que les économistes s'évertuent à prendre quoique dans le domaine de l'art, on sait bien que les pièces exceptionnelles continueront de s'arracher à des prix exorbitants et que tout ce qui ne l'est pas pâtira de la crise. A ce jeu-là, les riches deviennent plus riches surtout dans le domaine des tableaux et des dessins anciens, des objets d'art prestigieux et d'autres qui restent à la mode. Le problème est que comme dans le secteur des start-ups, on a étendu le terrain d'action à l'art contemporain où il y a à boire et à manger et surtout à se payer de drôles d'indigestions une fois que l'engouement sera passé. C'est dans ce domaine que la casse risque d'être importante surtout qu'entre un Jeff Koons et un Rembrandt, il n'y a vraiment pas photo. Les prix délirants enregistrés ces trois dernières années pour nombre d'artistes contemporains pourraient ainsi retomber comme un soufflé d'ici peu alors que personne ne s'est encore avisé de faire un point salutaire. Tant que vous y êtes achetez des œuvres de Erro, un pionnier du Pop Art trop délaissé, plutôt que du Warhol qui fut son imitateur au point même de le plagier sans vergogne. Il est vraiment dommage que cet artiste, né en Islande, n'ait pas été lancé par Leo Castelli, l'homme qui a permis à l'art contemporain américain de faire la nique aux créateurs de la vieille Europe. Depuis la Seconde Guerre Mondiale, les Etats-Unis ont annexé l'art de notre temps à leur profit après avoir instauré leur hégémonie sur le plan économique, envahi la planète avec leurs chaînes de fast-food et décrété que le camembert ou le roquefort n'avaient plus le droit de titiller les palais de leurs citoyens. A trop vouloir tirer sur la corde des cotes de leurs artistes contemporains, les Américains risquent de la distendre et de la casser et comme rien ne vient freiner le rythme démentiel des hausses pour l'instant, le scénario-catastrophe ne manquera pas de se produire un jour ou l'autre. A bon entendeur…
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