Représentant des héritiers d'Alphonse Kann dont la collection de tableaux modernes fut pillée par les nazis et les collabos durant la Seconde Guerre Mondiale, Francis Warin, ex-réalisateur de télévision et artiste peintre à ses heures perdues, mène une folle bataille pour récupérer les œuvres volées à son oncle.
Dernière offensive en date : la demande en restitution d'une œuvre cubiste peinte en 1919 par Picasso, «La Bouteille de Malaga» vendue à Londres pour près de 13 millions de francs par Christie's à la fin du mois du juin.
Voilà de quoi gonfler le compte en banque des avocats anglais sollicités par les héritiers d'Alphonse Kann lesquels dépensent chaque année près d'un million FF en frais de justice pour récupérer les tableaux du tonton qui réapparaissent çà et là sur le marché. A ce jeu, ils ne seront vraiment gagnants qu'en pouvant se faire restituer des œuvres qui valent bonbon et non pas en récupérant des tableaux moins intéressants comme ce Borès vendu notamment à Drouot durant la guerre en compagnie d'un Léger de la collection Kann dont Louise Leiris fut l'acquéreuse de ces deux oeuvres.
Une plainte vient d'être déposée par ces héritiers contre la galerie Leiris qui a refusé de régler l'affaire à l'amiable et le procès en référé prévu en septembre risque donc de faire du bruit puisque la réputation de la belle-sœur du marchand Kahnweiler durant l'Occupation n'aurait pas été irréprochable.
Pour l'instant, les héritiers Kann ont néanmoins réussi à remettre la main sur certains tableaux volés par les nazis, dont une huile importante de Gleizes, mais il leur reste encore beaucoup de chemin à faire pour retrouver une cinquantaines d'œuvres qui manquent à l'appel.
Warin mène ainsi un combat épuisant mais certes prenant en se faisant toutefois au passage de nouveaux ennemis parmi ceux qui se retrouvent visés par ses demandes en restitution. Des réputations et de grosses sommes étant en jeu, il ne s'attend guère à voir des adeptes du fair-play en face de lui.
Warin s'est en fait attaqué à de gros morceaux puisqu'il a affaire notamment à des musées américains et parfois à des grands marchands qui ne sont pas disposés à lui donner d'emblée satisfaction. Son attitude d'enquiquineur fait grincer bien des dents tandis que que d'autres semblent en avoir assez des «coups de Kann» donnés depuis une dizaine d'années par cet empêcheur de tourner en rond.