Ce dimanche 4 mars est à l'image d'un lundi car le marché aux Puces de Saint-Ouen semble à l'abandon sous la pluie. Il n'y a que les marchands qui se morfondent dans leurs stands dans l'attente de l'arrivée miraculeuse de quelques clients mais il y a fort à parier que ce sera en vain. A midi, rencontre avec Chester Fielx qui m'annonce avoir enfin obtenu de l'Institut Wildenstein un certificat d'authenticité pour son tableau de Lebourg échangé avec "Youki"il y a quelques mois. Décidément, la chance est avec lui en ce moment alors que Youki n'arrête pas de passer à côté des bons coups en lui refilant des oeuvres authentiques. Après le Burne-Jones, ça commence à faire plutôt désordre.
Déjeuner avec Maurice, Michaël et Chester au «Père Igor», le restaurant qui jouxte le marché Jules Vallés. Entre le hors d'œuvre et le fromage, la conversation tourne autour des affreux talibans, de la fonte des bronzes modernes, du droit moral des héritiers des artistes, des experts et de la situation économique qui ne semble pas aussi brillante qu'elle n'en a l'air.
A quatorze heures dix, Chester décide de faire un tour à Vallès en compagnie de Michaël pour voir notamment si «Doc Mich» a rentré quelque chose de nouveau dans son stand. Tandis que «Doc Mich» est occupé à discuter avec un voisin, Michaël avise un tableau aux accents surréalistes qui ressemble à s'y méprendre à une oeuvre d'Yves Tanguy.
Chester s'approche à son tour, trouve l'œuvre plutôt intéressante mais dans la foulée, déclare regretter qu'elle ne soit pas signée. Pas signée ? Michaël ne dit rien car, devenu comme pétrifié en une seconde, il vient de voir tout en bas du tableau et à son exact milieu, la signature de Max Ernst. Il retourne celui-ci, repère une étiquette portant le prix de 1500 FF et s'adresse alors à «Doc Mich» qui n'a pas fini sa conversation.
«Tu veux mille balles pour ce truc», lui déclare-t-il d'un ton qui se veut détaché.
«Hum… Mille ?... Bof... Allons… Ce sera ma première vente du week-end», répond-il fataliste.
Affaire conclue. Michaël s'en va sans plus attendre avec son acquisition sous le bras suivi de Chester qui le rattrape au bout de quelques mètres et lui dit avoir hésité devant cette œuvre étrange tout en répétant qu'il est dommage qu'elle ne soit pas signée.
«Hésité ? Et là, qu'est-ce que tu lis ?», lui déclare Michaël d'un air goguenard.
Chester se penche sur le tableau, fixe l'index de Michaël posé à l'endroit où figure la signature puis sursaute brutalement en découvrant enfin la signature.
«Bon sang ! Wouh mon salaud !», éructe-t-il d'une voix étranglée.
- Oh, tu ne peux quand même gagner à tous les coups ! Il faut bien laisser les amis profiter des bonnes choses. Et puis, rien ne dit encore que ce soit un véritable Max Ernst quoique cette œuvre semble parler d'elle-même…
Il reste qu'il faudra à Michaël une bonne dose de patience pour effectuer des recherches au sujet de cette oeuvre, faire des comparaison, déterminer sa possible date de création et enfin convaincre l'expert qu'elle présente tous les indices requis pour être authentique. Pas facile…