Vendredi 21 novembre 2003, deux individus armés ont braqué la salle de vente du Crédit Municipal rue des Francs-Bourgeois peu avant dix heures et sont repartis en emportant un butin de près d'un million d'euros dont un collier en diamant et des boucles d'oreilles de Cartier. Voilà deux zigotos susceptibles de passer un Noël plutôt brillant… Jeudi 27 novembre, le journal télévisé a annoncé qu'un chineur avait réussi à faire reconnaître un tableau de jeunesse de Van Gogh peint sur bois qu'il avait chiné aux Puces de Montreuil pour 1 500 euros il y a une dizaine d'années. Et dire que cette œuvre représentant une scène de labour avait été vendue auparavant pour environ 500 euros dans une vente courante à Drouot. Inutile d'ajouter que le commissaire-priseur qui tenait le marteau ce jour-là peut maintenant le reprendre et se cogner la tête pour avoir laissé échapper un tel chef d'œuvre qui sera offert à la vente par un commissaire-priseur de province.
Cette trouvaille semble belle au premier abord car elle démontre qu'il y a encore des trésors à découvrir dans les brocantes pour peu qu'on soit un chineur obstiné et avisé. L'heureux découvreur surnommé « Napoléon » compte quant à lui obtenir plus de deux millions d'euros pour cette œuvre de Van Gogh qui a été authentifiée par Benoît Landais, bête noire des experts du musée d'Amsterdam, et ce, après une longue étude qui a valu au découvreur bien des incertitudes et des tourments.
Il ne pouvait rien attendre de ces messieurs du musée qui se font souvent prier pour délivrer des certificats surtout qu'ils ont pour habitude de rejeter la plupart des œuvres censées avoir été peintes par cet artiste légendaire que des chineurs pensent avoir trouvées au hasard de leurs expéditions. Soyons francs, il est quand même très rare de dénicher un Van Gogh qui ne soit pas répertorié et des dizaines de chineurs se sont déjà cassé les dents à vouloir faire authentifier des œuvres de l'artiste maudit découvertes lors de leurs équipées dans des foires à la brocante ou des vide-greniers.
Il était donc plus facile à ce cher «Napoléon» d'aller solliciter l'avis de Landais plutôt que d'aller frapper en vain à la porte du Musée Van Gogh mais comme cet empêcheur de tourner en rond a peu de chances d'être reconnu comme l'expert patenté de Van Gogh, aucune maison de vente importante n'a voulu prendre le risque de la proposer aux enchères près de Bordeaux qui sera à coup sûr retiré de la vente faute d'être certifié comme il se doit.
Pour une centaine d'huiles trouvées ça et là, une seule aura peut-être la chance d'être authentifiée par les experts du Musée Van Gogh d' Amsterdam lesquels ont la réputation d'avoir des jugements plus que sévères au point d'être la cible de vives critiques de la part de marchands et d'historiens d'art, Benoît Landais en tête lequel a affirmé avoir retrouvé des dizaines de dessins de jeunesse de Van Gogh que le musée refuse obstinément de reconnaître.