A la surprise générale, le tribunal correctionnel de Paris a prononcé le 12 janvier 2017 la relaxe des héritiers de la famille de marchands d'art Wildenstein et leurs conseillers, qui étaient poursuivis pour une fraude fiscale se chiffrant en centaines de millions d'euros.
Le président du tribunal a certes épinglé la « claire intention » de dissimulation des Wildenstein, mais a pointé l'absence d'éléments légaux pour prononcer une condamnation.
Les différentes personnes liées à cette affaire étaient poursuivies pour avoir, à l'occasion du décès de deux chefs de famille domiciliés fiscalement en France, menti sur l'étendue d'un large patrimoine en immobilier de luxe et tableaux de maîtres qui avait été placé dans des trusts installés dans des paradis fiscaux.
Le parquet financier qui pensait tenir là une affaire emblématique propre à servir de jurisprudence en matière de jugement sur des avoirs dissimulés à l'étranger a donc subi une sévère défaite alors que l'accusation avait qualifié la dissimulation du patrimoine considérable des Wildenstein de fraude fiscale comme la plus sophistiquée et la plus longue de l'histoire de la Ve République.
Les montages financiers de la famille et notamment les fameux trusts typiquement anglo-saxons, un concept inconnu du droit français durant des années, ont bien laissé transparaître une volonté de dissimulation et une claire intention d'évasion fiscale mais le tribunal a estimé qu'il n'y avait pas d'éléments légaux pour une condamnation puisque la législation française n'avait clarifié la situation fiscale des trusts qu'en 2011 alors que les faits reprochés avaient eu lieu avant cette loi, ce qui signifie que cette affaire n'aurait jamais dû être jugée en dépit du fait que les juges ont eu conscience que leur décision risquait de heurter l'opinion.
Les avocats de Guy Wildenstein, l'héritier direct de Daniel, décédé en 2001, et des autres prévenus, n'avaient pas manqué de signaler dès le début du procès que les faits qu'on leur reprochait s'étaient déroulés avant 2011 et qu'il n'y avait pas donc pas lieu de les poursuivre en vertu d'une stricte application de la loi, ce que le tribunal a été obligé de retenir.
Ayant réclamé plus de 500 millions d'euros de pénalités à l'encontre de Guy Wildenstein et des autres héritiers de la famille, le fisc aura pour l'instant des difficultés pour faire valoir ses droits alors que les montages opérés par ses conseillers pour le compte de cette dernière se sont révélés imparables aux yeux de la justice. En attendant, le parquet a fait immédiatement appel de la décision du tribunal
en estimant qu'il y avait des arguments solides pour prouver l'existence d'une
fraude fiscale à grande échelle de la part des intéressés.