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Un homme accompli n'a en fait rien d'un homme fini...
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Le journal d'un fou d'art
Les fous d'art, ivres de savoir et de découvertes, riches ou moins nantis et sans cesse à l'affût des nouvelles relatives au marché de l'art, forment une belle légion à travers le monde. Sans eux, ce marché n'aurait donc sûrement rien de légendaire. Depuis plus d'une quinzaine d'années, Adrian Darmon a donc rassemblé à travers plus de 2200 pages de multiples anecdotes souvent croustillantes sur les chineurs, amateurs et autres acteurs de cet univers plutôt incroyable et parfois impitoyable.
VIIIème Chapitre
UN COUP DE VICE EFFACE PAR UN COUP DE CHANCE
01 Mai 2001 |
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Vendredi 11 mai, au cours de son tour de chine hebdomadaire au marché aux Puces de Saint-Ouen, Michaël s'est fait souffler en un dixième de seconde une miniature sur émail de la fin du XVIIe siècle par «Mike dit l'Américain», en fait un Anglais septuagénaire, ancienne figure pittoresque du marché Serpette où sa boutique, sale à souhait, ressemblait à un véritable capharnaüm, un type peu commode et plutôt bizarre, avec ses cheveux longs, sa gueule burinée et sa barbe blanche qui lui donnent l'air d'un vieux flibustier. Au moment où Michaël a tendu la main pour examiner cette miniature, «Mike», plus prompt, ne s'est pas gêné pour s'en emparer sous son nez et l'acquérir dans la foulée. Pas très sport le vieux grincheux, plutôt connu pour radoter méchamment sur tout le monde, mais le respect n'est vraiment plus de mise parmi les chineurs d'aujourd'hui à cause du manque flagrant de bonne marchandise. Voilà une pièce que «Mike», qui travaille maintenant en privé, mettra probablement en vente chez Sotheby's avec l'espoir de dégager un bénéfice de plus de 200%. Ce coup de vice a eu de quoi mettre Michaël en rage mais un ange gardien devait certainement veiller sur lui puisque vingt minutes plus tard au marché Paul Bert, il a trouvé sur sa route un marchand de la rue Jules Vallès qui s'est empressé de lui montrer ses dernières trouvailles. Et là, parmi un lot de trucs sans importance, il lui a sorti une aquarelle du peintre américain Childe Hassam. Affaire conclue à 1500 FF. Michaël n'a finalement pas perdu sa journée puisque cette acquisition devrait lui rapporter entre 60 000 et 100 000 FF… Vers sept heures, je rencontre le marchand qui attend depuis des semaines de savoir si son portrait de rabbin, acheté dans des conditions rocambolesques, est de Rembrandt ou d'un de ses élèves. Il m'annonce d'une voix triste qu'il n'a reçu aucune offre de la part du grand professionnel parisien qu'il avait contacté- ce qui veut dire que son tableau n'est pas vraiment intéressant- et qu'il reprendra son «chef d'œuvre» dans l'après-midi. Bref, on ne peut pas gagner à tous les coups. Pour le reste, le pont du 8 mai n'a pas favorisé les marchands dans leurs achats de la semaine et rares sont les pièces intéressantes que les chineurs ont pu trouver sur le marché, à part les frères Bailly qui ont fait une petite moisson lors de leur passage chez des brocanteurs qui leur réservent leurs trouvailles en priorité. Heureux privilégiés…
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Vendredi 11 mai, au cours de son tour de chine hebdomadaire au marché aux Puces de Saint-Ouen, Michaël s'est fait souffler en un dixième de seconde une miniature sur émail de la fin du XVIIe siècle par «Mike dit l'Américain», en fait un Anglais septuagénaire, ancienne figure pittoresque du marché Serpette où sa boutique, sale à souhait, ressemblait à un véritable capharnaüm, un type peu commode et plutôt bizarre, avec ses cheveux longs, sa gueule burinée et sa barbe blanche qui lui donnent l'air d'un vieux flibustier. Au moment où Michaël a tendu la main pour examiner cette miniature, «Mike», plus prompt, ne s'est pas gêné pour s'en emparer sous son nez et l'acquérir dans la foulée. Pas très sport le vieux grincheux, plutôt connu pour radoter méchamment sur tout le monde, mais le respect n'est vraiment plus de mise parmi les chineurs d'aujourd'hui à cause du manque flagrant de bonne marchandise. Voilà une pièce que «Mike», qui travaille maintenant en privé, mettra probablement en vente chez Sotheby's avec l'espoir de dégager un bénéfice de plus de 200%. Ce coup de vice a eu de quoi mettre Michaël en rage mais un ange gardien devait certainement veiller sur lui puisque vingt minutes plus tard au marché Paul Bert, il a trouvé sur sa route un marchand de la rue Jules Vallès qui s'est empressé de lui montrer ses dernières trouvailles. Et là, parmi un lot de trucs sans importance, il lui a sorti une aquarelle du peintre américain Childe Hassam. Affaire conclue à 1500 FF. Michaël n'a finalement pas perdu sa journée puisque cette acquisition devrait lui rapporter entre 60 000 et 100 000 FF… Vers sept heures, je rencontre le marchand qui attend depuis des semaines de savoir si son portrait de rabbin, acheté dans des conditions rocambolesques, est de Rembrandt ou d'un de ses élèves. Il m'annonce d'une voix triste qu'il n'a reçu aucune offre de la part du grand professionnel parisien qu'il avait contacté- ce qui veut dire que son tableau n'est pas vraiment intéressant- et qu'il reprendra son «chef d'œuvre» dans l'après-midi. Bref, on ne peut pas gagner à tous les coups. Pour le reste, le pont du 8 mai n'a pas favorisé les marchands dans leurs achats de la semaine et rares sont les pièces intéressantes que les chineurs ont pu trouver sur le marché, à part les frères Bailly qui ont fait une petite moisson lors de leur passage chez des brocanteurs qui leur réservent leurs trouvailles en priorité. Heureux privilégiés…
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